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Critique de le_Bison


J'échoue dans ce petit village de campagne, la voiture sur le bas-côté. Fin du voyage, fin d'une vie. S'abandonner ici, que certains qualifieront de trou perdu. Se lever avant le soleil, faire quelques longueurs dans l'eau froide de la rivière, et se fondre dans la nature sauvage de cette forêt sombre. L'esprit vide par ce sentiment de sérénité qui accompagne la langueur de mes mouvements de brasse, je sors de l'eau, l'orage gronde éclaboussant de sa fulgurance le silence de ce décor champêtre. de grosses gouttes se fracassent contre le calme de la rivière, juste le temps de sentir l'odeur de fougère qui s'évapore avec la venue des premiers rayons de soleil perçant l'horizon nébuleux. Je marche sous un ciel de traîne jusqu'au moulin, là où j'ai laissé mes cannes à pêche.

Sur la place du village, il y a cette librairie qui périclite au fil des jours et des saisons qui défilent dans cet arrière-pays. Il y a Armand, un autre vieux solitaire, qui tient encore tête aux banquiers et à leurs créances, question de survie d'un certain mode de vie. Il y a surtout Claire, sa nièce venue s'échouer également dans ce village. Elle a l'air éteinte, le regard presque triste. Ce coin perdu semble être celui des âmes échouées, des âmes solitaires qui ont perdus le sens de la vie, la motivation de l'envie.

Je m'assois en terrasse au « Café des Colonnes » et bois toujours sous le regard menaçant de ce ciel de traîne ma pinte de bière. Une blonde rafraîchissante et j'observe Claire, qui reprend vie dans ce pays lointain. Elle garde son mystère mais retrouve des couleurs, un sourire. L'air de la campagne, probablement. Je m'approche d'elle, comme attiré par une attraction mystique, défait sa robe, descend sa culotte, approche ma main, comme guidée par une attirance mystique.

Des musiciens amateurs jouent sur la place, pendant que jeunes et vieux se retrouvent aux « Colonnes », autour d'une bière ou d'une mauresque. Des airs de jazz illuminent la nuit, pendant que ce triangle solitaire tente de (sur)vivre mélancoliquement. Spleen d'un soir où je marche sous un ciel de traîne, sous les odeurs de fougères et les rayons d'une lune qui a abandonné son bleuté pour un voile de nuage. Les dernières gorgées d'une bière en terrasse, les derniers riffs d'une guitare, les dernières pages d'un premier roman, pas encore tout à fait le style si particulier de Maylis de Kerangal, mais un monde que je comprends, de par sa lumière, de par ses odeurs, de par sa tristesse. Et à la fin le secret bien gardé d'une période démarquée.
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