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Critique de JIEMDE


JIEMDE
11 décembre 2023
Tragédie shakespearienne en pays marocain.

Ailleurs, ils se sont appelés Montaigu et Capulet. Ici, dans cette vallée marocaine des Lazhars à deux pas de la frontière algérienne, ce sont les familles Ayami et Hokbani qui s'opposent et se haïssent depuis plusieurs générations, parce que « c'est comme ça depuis toujours. »

Quand Amir, la vingtaine, rentre de France pour passer l'été au village où il n'est plus revenu depuis six ans, il retrouve les siens du clan Ayami, dont Farah, qui doit épouser Ayoub, un Hokbani. Et aussi Haroun, le cousin adoré mais rebelle, amoureux de la belle Fayrouz…

Les jours passent et Amir se découvre un peu étranger de sa propre famille, spectateur d'un drame qui se joue sans qu'il n'en saisisse toutes les dimensions. Lui-même attiré par Fayrouz, il sent la tension monter sans pouvoir arrêter la tragédie qui s'annonce.

« Je ne pouvais faire entièrement partie de la vie des Lazharis, parce que la vie, c'était ce qui s'écoulait entre mes séjours ici, en mon absence. »

Pour un premier roman, La Vallée des Lazhars de Soufiane Khaloua est particulièrement réussi, étonnant de maîtrise du début à la fin. Sur fond de rivalités familiales, l'auteur nous plonge dans une touchante réflexion sur les racines, l'identité, la famille et les frontières, virtuelles ou réelles, qu'on décide, ou pas, de franchir.

« Or si je n'étais pas tout à fait marocain, je ne me sentais pas pour autant tout à fait français. Alors je souhaitais être Ayami avant tout, et la vallée des Lazhars devait être ma patrie. »

Il visite et partage les marqueurs de sa terre : la famille ; la tradition ; l'hospitalité qui « est notre unique titre de noblesse. Elle nous permet de haïr sans jamais en venir au meurtre » ; les voisins algériens bien pratiques pour le trabendo, mais « qui nous ressemblent trop pour qu'on les haïsse. ».

Et puis il y a ces paysages, ces lumières, ces nuits, ce « parfum » envoûtant d'une terre que Khaloua ne cesse de décrire en empruntant ses mots au registre amoureux et poétique :

« C'était l'heure des coucheries entre la Lune et la Terre, une heure où l'on nous prouve que tout possède une vie propre en dehors des humains, tout existe dans notre dos, sans aucun besoin de notre présence. Je me sentis moins nécessaire et moins intéressant qu'un arbre ou une pierre du paysage. »

C'est beau, réussi et on peut se précipiter !
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