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Critique de aureliedutriez
Dans cette édition, le texte De Rudyard Kipling est abrégé pour se concentrer sur les aventures de Mowgli, de sa découverte par le Clan des Loups alors qu'il n'est encore qu'une petite Grenouille, à l'âge d'Homme, où « Mowgli chassera Mowgli » de la Jungle.
Beauté verdoyante et foisonnante de la Jungle, magnétisme de la Panthère, appel fascinant du Printemps, le texte regorge de moments poétiques et hypnotiques, tels les anneaux de Kaa, le Python bienfaisant.
Conte initiatique, mais aussi fable mettant en scène des animaux personnifiés, récit d'aventures où la ruse permet de combattre les plus forts, l'oeuvre s'intègre parfaitement au programme de 6e (correspondant à 2 thématiques sur 4), et le récit animalier demeure d'une attraction sans faille, notamment auprès du jeune public.
C'est aussi l'occasion d'aborder la question de l'identité : qui est Mowgli ? Un petit d'Homme ? Un loup ? Sa double appartenance fait de lui à la fois un être hors-du-commun, alliant force, instinct et intelligence, mais aussi un individu relativement solitaire, rejeté des deux côtés, ne devant sa survie qu'à quelques fidèles alliés : sa famille Loup, Akela, Messua, et bien sûr les emblématiques Baloo, Bagheera et Kaa.
Mowgli, c'est cet éternel étranger, qui offre un regard neuf, à la fois sur les moeurs des animaux et sur ceux des hommes, dans la droite lignée d'Usbek (Les Lettres Persanes, de Montesquieu), de Candide ou de Micromégas, et offre également des résonnances rousseauistes. le passage de l'ankus du roi, méconnu, est sublime dans sa narration, mêlant trésor, prophétie et enquête quasi-policière, et parfaitement révélateur des vanités humaines. le conte initiatique se fait philosophique.
Le genre du conte est mis en abyme de manière particulièrement ironique à travers la figure de Buldeo, le Chasseur, qui raconte des histoires déformées de la Jungle aux villageois au coin du feu. C'est l'occasion de revenir sur la tradition orale, la création de l'imaginaire par les mots, et sur la distinction entre le mensonge, incarné par Buldeo, et la fiction… d'autant que l'une des histoires du Chasseur se révélera finalement vraie !
Enfin, le Livre de la Jungle, c'est aussi une plongée mystique dans l'Inde. Les noms, exotiques, nous plongent dans un ailleurs merveilleux et pourtant réaliste. Plus profondément, on sent l'influence de la littérature indienne chez Kipling, notamment à travers le motif de la Reconnaissance, dans la plus pure tradition indienne : les traces sur les corps des animaux permettent de les identifier, les yeux de Mowgli permettent de le faire reconnaître par sa mère. La mémoire et l'absence sont également au coeur du récit. Sans nul doute, Kipling avait lu Shakuntala et le Signe de Reconnaissance, pièce de théâtre sanscrit écrite par Kalidasa, traduite à la fin du XVIIIe et très en vogue au XIXe.
Evidemment, certaines choses dérangent les esprits contemporains : la supposée domination de l'homme sur l'animal, l'ombre esquissée du colonialisme (les Anglais, détenteurs de la Loi humaine, font régner la justice dans le Village des hommes plus proches de la Jungle), et bien sûr, la violence, parfois. C'est la Loi de la Jungle, celle de la chaîne alimentaire.
Violence de Mowgli lui-même, dépeçant Shere Khan et brandissant la peau telle un trophée, ou portant un coup presque gratuitement à un taureau l'ayant insulté. Violence de la bataille finale entre les dholes (les Chiens Rouges) et les Loups, où les morts s'amoncellent. Ces passages sont à occulter (à sauter), ou à expliquer, selon la sensibilité des élèves. Il faut rappeler que chaque époque a son mode de pensée, et que nous ne percevons pas les choses comme elles pouvaient être perçues au XIXe siècle.
En conclusion, texte à la fois simple et magnifique, animaux flamboyants, plongée dans un monde fascinant et mystérieux, réflexion sur l'identité, la société, la Loi, le cycle de la vie, l'oeuvre de Kipling regorge de richesses, comme autant de fruits exotiques et de plantes verdoyantes. N'hésitez pas à vous y plonger avec délices !
Beauté verdoyante et foisonnante de la Jungle, magnétisme de la Panthère, appel fascinant du Printemps, le texte regorge de moments poétiques et hypnotiques, tels les anneaux de Kaa, le Python bienfaisant.
Conte initiatique, mais aussi fable mettant en scène des animaux personnifiés, récit d'aventures où la ruse permet de combattre les plus forts, l'oeuvre s'intègre parfaitement au programme de 6e (correspondant à 2 thématiques sur 4), et le récit animalier demeure d'une attraction sans faille, notamment auprès du jeune public.
C'est aussi l'occasion d'aborder la question de l'identité : qui est Mowgli ? Un petit d'Homme ? Un loup ? Sa double appartenance fait de lui à la fois un être hors-du-commun, alliant force, instinct et intelligence, mais aussi un individu relativement solitaire, rejeté des deux côtés, ne devant sa survie qu'à quelques fidèles alliés : sa famille Loup, Akela, Messua, et bien sûr les emblématiques Baloo, Bagheera et Kaa.
Mowgli, c'est cet éternel étranger, qui offre un regard neuf, à la fois sur les moeurs des animaux et sur ceux des hommes, dans la droite lignée d'Usbek (Les Lettres Persanes, de Montesquieu), de Candide ou de Micromégas, et offre également des résonnances rousseauistes. le passage de l'ankus du roi, méconnu, est sublime dans sa narration, mêlant trésor, prophétie et enquête quasi-policière, et parfaitement révélateur des vanités humaines. le conte initiatique se fait philosophique.
Le genre du conte est mis en abyme de manière particulièrement ironique à travers la figure de Buldeo, le Chasseur, qui raconte des histoires déformées de la Jungle aux villageois au coin du feu. C'est l'occasion de revenir sur la tradition orale, la création de l'imaginaire par les mots, et sur la distinction entre le mensonge, incarné par Buldeo, et la fiction… d'autant que l'une des histoires du Chasseur se révélera finalement vraie !
Enfin, le Livre de la Jungle, c'est aussi une plongée mystique dans l'Inde. Les noms, exotiques, nous plongent dans un ailleurs merveilleux et pourtant réaliste. Plus profondément, on sent l'influence de la littérature indienne chez Kipling, notamment à travers le motif de la Reconnaissance, dans la plus pure tradition indienne : les traces sur les corps des animaux permettent de les identifier, les yeux de Mowgli permettent de le faire reconnaître par sa mère. La mémoire et l'absence sont également au coeur du récit. Sans nul doute, Kipling avait lu Shakuntala et le Signe de Reconnaissance, pièce de théâtre sanscrit écrite par Kalidasa, traduite à la fin du XVIIIe et très en vogue au XIXe.
Evidemment, certaines choses dérangent les esprits contemporains : la supposée domination de l'homme sur l'animal, l'ombre esquissée du colonialisme (les Anglais, détenteurs de la Loi humaine, font régner la justice dans le Village des hommes plus proches de la Jungle), et bien sûr, la violence, parfois. C'est la Loi de la Jungle, celle de la chaîne alimentaire.
Violence de Mowgli lui-même, dépeçant Shere Khan et brandissant la peau telle un trophée, ou portant un coup presque gratuitement à un taureau l'ayant insulté. Violence de la bataille finale entre les dholes (les Chiens Rouges) et les Loups, où les morts s'amoncellent. Ces passages sont à occulter (à sauter), ou à expliquer, selon la sensibilité des élèves. Il faut rappeler que chaque époque a son mode de pensée, et que nous ne percevons pas les choses comme elles pouvaient être perçues au XIXe siècle.
En conclusion, texte à la fois simple et magnifique, animaux flamboyants, plongée dans un monde fascinant et mystérieux, réflexion sur l'identité, la société, la Loi, le cycle de la vie, l'oeuvre de Kipling regorge de richesses, comme autant de fruits exotiques et de plantes verdoyantes. N'hésitez pas à vous y plonger avec délices !
