J'apprécie les romans historiques, quand l'Histoire est évoquée à travers des points de vue individuels, quand les auteurs nous donnent à lire les répercussions des événement sur la sphère privée. C'est donc tout naturellement que j'ai été attirée par
Envers et malgré nous de
Laurent Koessler.
Ce roman nous plonge dans la complexité de l'Histoire de l'Alsace et de la Moselle lors de la seconde guerre mondiale, zone très tôt occupée et sous domination allemande.
Il s'agit de vivre, de l'intérieur, l'enquête d'un jeune journaliste, Étienne Wéber, sur le passé de son grand-père avec qui il avait coupé les ponts, ayant appris qu'il avait servi « volontairement » dans l'armée allemande. Au décès de son aïeul, il devient le dépositaire du témoignage sur ce que ce dernier a réellement vécu.
Louis Wéber faisait partie des « Malgré nous », ces jeunes hommes enrôlés de force dans l'armée du 3ème Reich, véritables otages de l'Histoire, contraints de se battre contre la France ou, s'ils essayaient de se soustraire à cette incorporation forcée ou désertaient, susceptibles de condamner leurs proches aux pires représailles. Son petit-fils va lire son manuscrit à travers le prisme des considérations et du recul de notre époque contemporaine, tout en se mettant à la place de ces jeunes gens, se demandant ce que lui, à leur place, aurait fait.
L'écriture est polyphonique, alternant le présent de narration à la première personne d'Étienne et sa lecture du manuscrit de son grand-père, deux JE entrecroisés, précisément datés.
Le récit du grand-père est captivant ; le lecteur est forcément dans l'attente d'une explication, d'une plongée dans le contexte de l'entre-deux guerres, puis dans celui de la domination allemande et, en cela, il rejoint la posture du petit-fils.
Ce dernier vit et partage avec nous une véritable expérience immersive, d'abord parce qu'il prend connaissance du manuscrit de son aïeul dans des circonstances bien particulières, dans un lieu imposé par
Louis Weber dans ses dernières volontés, puis parce que ce récit commence loin en amont de son incorporation dans l'armée allemande, dès sa petite enfance.
Et puis, il y a aussi le prisme de la profession d'Étienne, journaliste, une profession au coeur de l'action d'informer, un métier souvent fustigé autour de postures dévalorisées, de manque de fiabilité, de raccourcis rapides sans vérifications ni recherches approfondies.
Ce livre est très bien documenté sur la période et sur la particularité de la région Alsace-Moselle.
Laurent Koessler a enrichi son récit de nombreuses notes de bas de page, explicitant les évènements décrits par des faits avérés et vérifiables.
Un roman très intéressant, un récit didactique.
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