Citations sur Hazel (36)
Longtemps je n'ai été qu'une ombre, une oubliée. On n'en parle pas, on ne la voit pas. Tout a changé si vite, un matin. De petite fille, je suis devenue une femme. La transition a été violente. Le monde m'était dèjà hostile, il était devenu sans pitié
Et pourtant, je la cherche aujourd'hui dans tous les visages.
Tout a changé si vite, un matin. De petite fille, je suis devenue une femme. La transition a été violente. Le monde m’était déjà hostile, il était devenu sans pitié. La veille, je me trouvais sur le chemin de l’école. Le jour d’après, j’étais sifflée dans la rue, harcelée, « donne‑moi ton numéro », esquivant habilement, déjà, les mains au cul dans le métro. Comment supporter d’être la cible préférée de la moitié du genre humain ? D’être une simple poupée de chiffon, une fille de rien et tout à la fois, l’objet de l’abject désir. Ils repèrent, ils veulent, ils prennent, ils jettent. Tout n’est que violence.
Mon talent n’échappait à personne et les rumeurs avaient vite fait le tour de l’agence. "Elle ne restera pas longtemps stagiaire. On les connaît les filles comme ça , elles s’imposent à la force du poignet", entendais‑je les hommes dire dans un rire gras. La force du poignet, ça voulait dire que j’avais dû coucher pour être la plus jeune collaboratrice de l’agence. Ça dérangeait que je sois la seule femme dans la cour des grands.
(dédicace)
Aux fêlées, aux cassées, aux déchues, aux maudites, aux damnées, à toutes celles qui peinent à trouver leur place dans ce monde.
Je ne pouvais pas laisser Ian me traiter comme une marionnette .je ne pouvais pas le laisser définir quelle était ma place, ce que j'avais le droit de dire ou non, de me garder sous le coude, comme une plante verte fanée dans son salon. Je ne
pouvais pas être cette meuf en demande, entre supplications et silence contrit. Il fallait reprendre nos routes chacun de son côté. Une ultime fois , j'avais hurlé à l'aide et je n'avais rien eu en retour . J'implorais sa présence, il n'était pas venu . reste moi, vide et vidée sur mon canapé à regarder l'heure tourner et à attendre les bruits de ses pas dans le couloir.
On ne se parle pas, tout n'est que silence, encore et toujours. Je ne cherche pas à remplir les blancs car il n'y a pas de mots à trouver. C'est ce que j'aimais le plus avant, les blancs. Maintenant, je les subis et peut-être que lui aussi, après
tout .
je ne supporte plus la violence des non-dits et l'impression que tout ça ne mène à rien. MOn vieil ami, le voile noir ,tombe de nouveau sur moi, il m'ensevelit, il brouille ma vue et je vois mal comment ça pourrait être pire. En fin de compte, rien ne
compte.
L'enfer n'est pas aussi terrible que le chemin qui mène.
Fille facile. Allonge-toi, tourne-toi, à genoux, pas comme ça, souris, relève tes cheveux, ondule, bouge les épaules, souris encore mais un peu moins, ne coupe pas tes cheveux, les vraies femmes ont les cheveux longs, tiens-toi
droite, sois classe mais pas trop, mets du rouge sur ta peau, sur tes ongles, sur ta bouche, ne dis rien, surtout, sois silencieuse, une fille bien ça ne la ramène pas, sois une femme, sois féminine mais tais-toi, sois belle et tais-toi, ne pense pas, si tu
penses, ne le dis pas, allonge-toi, ne te retourne pas, ne dis rien.
Ian avait tenté sa chance de designer free-lance, ça n’avait pas fonctionné. Depuis qu’on vit la start-up nation, tout le monde essaie, tout le monde se plante. On nous vend que les CDI, c’est has been, que nous, on doit être de jeunes entrepreneurs, que le monde est à nous, pour peu qu’on ait des idées. Tu parles. Le monde est à personne. On avale des couleuvres et on doit s’en rengorger. La start-up nation. Banale histoire de la France macroniste.