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Critique de Riduidel


Difficile de décrire ce roman, pourtant excellent. je vais essayer d'en tracer les grandes lignes ...Ce roman raconte comment vivent ce qui ne vivent que par le regard des autres.Ce roman raconte, d'une certaine façon, comment chasser les terroristes.Ce roman raconte notre époque dans ce qu'elle a de si déprimant.Ce roman est peut-être le meilleur roman de zombies ayant existé.Ce roman remet au goût du jour l'urban fantasy.Bon, je vais quand même essayer de détailler.De nos jours, un groupe de recherche s'interroge sur l'existence des signes de pouvoir permettant de commander d'autres humains simplement en leur montrant ce signe.Un autre groupe en tire une arme, qui sera utilisée de façon parfaitement dramatique (génocide mental compris).Dans le monde qui se reconstruira après le génocide, les criminels seront tous condamnés à mort sauf une : la muse qui les a inspiré ... Si tant est qu'elle ait existé.Longtemps après le premier proçès, des historiens mènent l'enquête pour vérifier si elle a bien existé, et, si c'est le cas, tenter de la retrouver pour l'arrêter.Encore une fois, cette description est fausse.Parce que la première chose que réussit ce roman, c'est à toujours se placer juste au-delà du seuil de la compréhension. Par sa construction, d'abord : les différentes étapes de l'enquête sont racontées sous la forme d'un fix-up, avec des narrateurs différents, des modes de narration différents, des points de vue différents, et donc des conclusions pas forcément cohérentes auxquels le lecteur doit rendre sa cohérence, bien aidé par l'auteur.Par sa cible ensuite : la Lady Star du titre ne laisse sa trace que par l'absence de traces, et il faut donc, comme l'enquêtrice, voir où les récits sont fragmentaires, combler les trous et faire un vrai travail d'enquête, ce qui évidement améliore notoirement l'implication du lecteur.Par son décor enfin : il y a dans cette histoire une fuite vers les étoiles, qui est à peine décrite. Il y a aussi la catastrophe de la bombe iconique, qui est surtout un élément historique. Il y a de la même manière la création d'univers virtuels, qui sont eux aussi à peine présentés. Tout cela change terriblement, et en bien, de tous ces romans d'anticipation remplis d'infodumps qui expliquent chaque élément d'histoire, de décor ad nauseam. Là, l'utilisation de l'ellipse m'a permis de me concentrer sur les aspects clé du récit, et je dois dire que c'était vraiment mieux sans les 300 pages qui auraient dû découler de toutes ces explications.Clairement, tout cela m'a fasciné.Et cette fascination tient aussi à la façon dont le premier récit ancre ce roman, de façon quasi-prophétique, dans l'actualité : qui peut prétendre aujourd'hui qu'il n'existe pas, dans les organes stratégiques, de militaires qui réfléchissent à l'utilisation de la mémétique en tant qu'arme ? Qui peut prétendre, au vu de l'actualité toujours, qu'il n'y a pas de volonté politique de détruire certains groupes de personnes plus ou moins bien identifiés ? Utiliser cette peur comme ferment d'un roman, mais ne pas se laisser emporter par cette peur, c'est quand même assez balaise.Comme l'est aussi, d'ailleurs, l'utilisation de la Suisse comme paysage. Evidement, les Kloetzer habitent la Suisse, et le paysage montagneux peut nourrir durablement l'imaginaire, et c'est tant mieux.Finalement, et c'est peut-être le plus incroyable, il y a quand même là-dedans une réflexion forte sur ce qu'est la personnalité : vivons-nous par nous-même ou au-travers des autres ? le fait que la cible de la poursuite n'existe que par les traces qu'elle laisse chez les autres m'a donné, plusieurs fois, l'impression qu'elle n'était qu'un fantôme, une obsession n'existant que dans les yeux de ses poursuivants. Ou plutôt un souvenir qu'il faut expurger. D'ailleurs, le fait que cette enquête passe avant tout par des souvenirs, qu'ils soient humains ou enregistrés, en dit beaucoup : si personne d'autre que les enquêteurs ne voit la cible de l'enquête, existe-t-elle réellement ? Et les enquêteurs eux-mêmes, si leur seul travail est d'enquêter sur une ombre, sont-ils fous ? En un sens, ce roman m'a fait penser aux [b:Menhirs de glace|1960500|Menhirs de Glace|Kim Stanley Robinson|https://d.gr-assets.com/books/1190913779s/1960500.jpg|1963545] de [b:KS Robinson]. En effet, dans les deux cas, tout repose sur la mémoire, mais la mémoire ne peut plus être considérée comme fiable. Alors ? Cette quête peut-elle s'arrêter un jour ? Ou autrement que par la mort des enquêteurs ?Comme vous le voyez, cette oeuvre est riche d'aspects parfaitement passionants, et présente l'avantage de n'offrir que bien peu de réponses. du coup, pour être honnête, c'est une oeuvre à lire absolument ... et pas seulement pour les fans de SF.
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