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Critique de Fandol


Cette sombre histoire d'oeuvres d'art volées par des trafiquants sans foi ni loi est édifiante mais elle vaut surtout pour son côté historique. Dans L'île déchirée, Aude Lafait prouve combien elle connaît Chypre pour y avoir vécu de 2010 à 2012.
Au travers de ce polar, elle vient à point nommé remettre en mémoire, aux gens comme moi ou apprendre aux plus jeunes, ce qui s'est passé à Chypre en 1974. L'île était indépendante du Royaume-Uni depuis 1960, même si l'ex-colon y avait conservé et y possède toujours deux bases militaires. Des nationalistes grecs voulaient rattacher Chypre à la Grèce, à l'époque sous la dictature des Colonels qui fomentent un coup d'État contre le Président chypriote, Makarios. Pour protéger la minorité turque – 18 % de la population en 1974 – la Turquie intervient et occupe 38 % du territoire, refusant de se retirer à la chute des Colonels. Ainsi, survit toujours une République turque de Chypre reconnue seulement par la Turquie alors que la République de Chypre est membre de l'Union Européenne depuis 2004 et fait partie de la zone euro depuis 2008.
Chypre est donc coupée en deux, déchirée comme le dit si bien Aude Lafait, par une frontière agrémentée... de check-points depuis 2003. Cela rappelle Berlin avant la chute du mur mais on ne parle plus trop de cette « ligne verte » qui coupe aussi Nicosie, la capitale, en deux. C'est dans ce no man's land, zone dévastée vidée de ses habitants, que le corps du jeune Stravos Alexiou, marchand d'art, est retrouvé.
L'inspecteur Michaelides se lance alors dans une enquête passionnante, parfois un peu compliquée, pour tenter de découvrir qui a tué Stravos et pourquoi. Les oeuvres d'art volées et revendues étant presque toutes religieuses, l'auteure nous plonge dans cette religion orthodoxe majoritaire à Chypre sauf dans la zone turque où les musulmans ferment les églises dont les trésors - icônes, mosaïques, croix ornées de pierres précieuses – disparaissent.
Elenia Alexiou, soeur de Stravos et Xenia, sa mère ont un rôle important, comme le Père Stephanos qui a bien connu le mari de Xenia, prêtre orthodoxe lui aussi mais porté disparu lors de la fuite des siens devant l'invasion turque.
J'ai bien aimé cette enquête qui fait remonter à la surface des événements historiques trop vite oubliés tout en stigmatisant le pillage des oeuvres d'art de ces pays fragilisés par une situation politique instable. En tout cas, pour son second roman, Aude Lafait démontre un réel talent et une maîtrise d'écriture à suivre.
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