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Critique de Lucilou


Dans ce monde de brutes, où les cyniques sont rois et où les tyrans haranguent les foules; dans ce monde qui nous condamne à sourire, à embrasser même avec les yeux et à troquer les salles obscures contre Netflix; dans ce monde où les bons ne triomphent jamais (ou alors si rarement!) et où les méchants se sont délestés de leurs destriers noirs pour les bureaux chromés de lobby surpuissants, on a parfois besoin de douceur et d'une bouffée de romantisme. D'une bulle où se réfugier, d'un cocon où se pelotonner pour oublier que le monde va mal et qu'il n'a jamais été si laid qu'aujourd'hui et pour se rappeler aussi combien la vie peut-être belle parfois, et poétique.

"Malgré tout" a tout de la bulle et du refuge. Il dresse des arcs-en-ciel sous la pluie et jette du bleu sur le noir qu'on broie. Il convoque les papillons, les fait pétiller comme du champagne et fait palpiter le coeur et ça fait du bien.

Ana et Zéno s'aiment depuis trente-sept ans mais ils n'ont jamais pu vivre cet amour au grand jour: leur histoire est faite de rendez-vous manqués, de mauvais timing et de hasards.
Et puis, ils sont si différents: Ana a été maire de sa petite ville pleine de mouettes des années durant et a les pieds bien ancrés sur terre.
Zéno est un doux dingue, un physicien poète qui soutient sa thèse avec un envol de papillons et qui a pris la mer bien longtemps.
Ana s'est mariée et a eu une fille.
Zéno n'a jamais su s'engager.
Trente-sept ans à se rater, à s'espérer et à s'attendre. A se téléphoner chaque semaine à la même heure aussi.
Et si, malgré le temps qui passe, il n'était pas trop tard?

Le romantisme de ce roman graphique est échevelé, optimiste, lumineux et il est servi à merveille par une narration originale, puisque l'histoire est racontée à rebours, cheminant de sa fin à son début, un procédé fantaisiste et d'une poésie certaine qui n'est pas sans évoquer le cinéma joliment décalé de Michel Gondry.
Et s'il n'y avait que cette histoire et ses personnages, terriblement attachants...
Mais non! Il faut compter aussi sur l'art et les dessins de Jordi Lafebre, pétris de tendresse et de poésie, de douceur. C'est un délice pour les yeux (ces regards!) qui fait du bien à l'âme.

"Malgré tout" pour y croire encore, pour rêver et se départir de ce cynisme qui va finir par nous coller à la peau.
"Malgré tout" pour oublier le gris et le repeindre en rose ou en étoiles.
C'est moins risqué qu'un achat compulsif de peinture où que la consommation d'anxiolytique et ça rend heureux.


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