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Critique de EtienneBernardLivres


Le destin, très ironique et cruel, offre à Lamartine les plus propices évènements à un drame romantique.

Raphaël (qui est en fait Lamartine) vagabonde près de Chambéry dans un hôtel au bord d'un lac où il aperçoit une femme sublime et discrète.
Il n'ose l'approcher, mais l'admire déjà.
Ce n'est pas seulement son physique qu'il admire, son aura seule l'attire, un mystère plane autour de cette femme.
Bien qu'il ne soit pas timide, un respect presque sacré pour l'intimité féminine l'empêche de communiquer ouvertement avec elle.

Leur rencontre, orchestrée par le destin, se produit lors d'une tempête où Raphaël sauve héroïquement la dame.
Cette proximité forcée rompt les barrières initiales, ouvrant la voie à une intimité progressive, bien qu'elle reste entourée de mystère et de retenue, sans jamais relever de la niaiserie pour autant.

Les échanges entre Raphaël et Julie, tout d'abord réservés, deviennent plus profonds lors d'une seconde rencontre fortuite.
Ils se confient enfin. chacun se demande pourquoi l'autre passe autant de temps à errer sur ce Lac en pleine autonome à cet âge (ils ont chacun près de 30 ans). En réalité, les deux personnes errent sans but, Raphaël, sans être dépressif, se complait dans la solitude, la nature, il pourrait passer pour misanthrope mais ne l'est pas. Julie a un peu le même caractère, mais sa vie personnelle aggrave sa situation. Orpheline, recueillie par un vieil homme très cultivé qui a pourvu seul à son éducation, elle a baigné dans une éducation très philosophique, profondément athée. Ses pensées philosophiques la poussent à se reconnecter à la nature mais contribuent aussi à sa solitude morbide, elle semble ne pas vivre dans le présent, se posant sans doute trop de questions existentielles. C'est surtout la mort qui l'obsède. Elle se sait atteinte d'une tuberculose qui devrait bientôt la condamner définitivement et ne recherche plus rien. Elle semble attendre avec enthousiasme et impatience la mort dans le berceau de la nature.

L'acte héroïque de Raphaël illumine brièvement l'existence sombre de Julie. Elle développe un engouement progressif pour Raphaël qui est autant son sauveur au sens physique que moral, son état de santé s'améliore même progressivement par sa présence.
Elle est partagée entre une résistance ferme à tout attachement envers lui et cette sensation incontrôlable du romantisme, qui prendra brièvement le dessus pour former un amour réciproque et soudainement fusionnel.
Raphaël aime son esprit fin, ses paroles rares et profondes, jusqu'a même préférer le silence entre eux aux paroles.
Julie fait pourtant tout pour le dissuader d'un amour nocif, en ce qu'elle serait trop malade pour établir une relation. Sûr de lui, Raphaël persiste et sait qu'il a trouvé un être rare et sensible.
Julie, qui est autant étonnée que charmée de la persévérance de Raphaël, s'abandonne totalement à lui, elle qui n'a plus rien à perdre.
Leur extase commune est ponctuée de mélancolies éphémères provoquées par Julie, craignant une souffrance inutile pour Raphaël.
Le voyage à Chambéry est longuement prolongée par les deux personnages, où Lamartine excelle dans l'art de romancer le moindre détail de la nature, de leurs promenades variées.

Leur séparation temporaire à Paris intensifie la mélancolie de Julie. Elle dissimule son déclin de santé à Raphaël, augmentant l'intensité dramatique du récit. La proximité de la mort, constante et insidieuse, imprègne chaque page du roman, accentuant la profondeur et la sincérité de ce roman presque entièrement autobiographique De Lamartine.
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