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Critique de AmeliaChatterton


Rien de tel qu'un thriller fantasy sous les tropiques pour se réchauffer en plein automne ! Après avoir lu le premier tome de cette trilogie aux allures de Hunger Games, me voici de retour sur l'Archipel en compagnie de Shivan qui va s'engluer peu à peu dans un piège machiavélique. Suspense et rebondissements sont à l'honneur dans un deuxième tome aussi angoissant que surprenant…

Un thriller young adult

Dans le premier tome de la série, l'auteur brillait par une intrigue teintée d'une multitude d'actions qui s'enchaînent. Ici, c'est l'inverse mais tout aussi brillant : nous sommes dans un huis-clos à l'ambiance pesante, où Shivan le héros se méfie de tout le monde, et même de ses amis proches. le nouveau Zilwa aurait-il basculé dans la paranoïa ou ses soupçons sont ils justifiés ? Il faut avouer que sa nomination en tant que chef a bouleversé son univers.

Dans son cercle d'amis, Bojun a une attitude étrange envers lui et semble distant. Alynn a embrassé une carrière de soldat du Zilwa, et surtout le célibat. Elle ne répond donc pas aux sentiments que Shivan a à son égard. Enfin, Melen, qui a retourné sa veste pour aider Shivan à devenir Zilwa, est devenue une sorte de « réfugiée politique » au sein du palais. Protégée par Shivan, elle semble avoir de l'attirance pour le nouveau Zilwa.

En dehors de ses amis, le Chaman Gadar censé conseiller Shivan, a l'allure du Grand vizir d'Aladin ou du professeur Rogue selon les cas : tantôt il le conseille mal, tantôt il lui dicte sa conduite. On ne sait pas trop s'il souhaite l'aider ou s'il veut régner à sa place. Shivan reste persuadé qu'il cherche à le manipuler et enquête sur ses faits et gestes plus ou moins secrètement.

A côté des bouleversements de son quotidien, Shivan doit faire face à un complot latent découvert par Pelayo, son garde rapproché. Dans le palais, un assassin rôde sous le nom du Fourmilion et a déjà frappé. Mais les coupables sont-ils ceux qu'il soupçonne ?

Chaque chapitre a son lot de rebondissements et on ne peut s'empêcher de lire sans s'arrêter pour découvrir la suite. Si par moments on réussit à deviner une partie du complot, j'ai été assez surprise du rebondissement final concernant deux personnages impossible à deviner.

Gouverner, une tâche difficile

Shivan est jeune, environ 18 ans, mais par moments, il a la maturité proche d'un enfant de 12 ans. Devenir Zilwa, chef de l'archipel et protecteur contre la grande vague, est une charge qu'il ne s'attendait pas à assumer et qu'il n'a pas désiré au départ. Son règne est empli de bonne volonté mais aussi de maladresses. Son tiraillement amoureux entre Alynn et Melen ainsi que le complot dont il est victime ne vont pas arranger les choses.

Par ailleurs, son intronisation se fait une semaine à peine les Trois rites terminés. Cela peut s'avérer traumatisant et stressant pour quelqu'un qui la veille, tentait de survivre pour sauver sa peau et voyait ses amis mourir.

Si dans les premiers temps il se laisse porter par les évènements de son intronisation et des premiers rituels en tant que Zilwa en s'appuyant malgré lui sur son Chaman, il va tenter par la suite de prendre des décisions seul, estimant qu'on le traite comme un enfant.

Or, ses décisions ne seront pas pour autant matures, surtout concernant Melen pour qui il éprouve peu à peu des sentiments contradictoires. de plus, il a l'envie assez louable de modifier des traditions séculaires injustes comme le statut des piqueuses d'outrites ou des hérétiques, ou encore l'amélioration des conditions de vie des habitants de Sudile. Mais cela ne sera pas au goût de tous, et va provoquer des remous parmi les habitants.

En effet, la population vit selon un système bien établi et séculaire, alimenté par la religion et les légendes de l'île. Au fil du roman, on se rend compte assez facilement d'ailleurs de la différence de traitement entre le Nord et le Sud de l'île, entretenu au fil des siècles : au Nord les maisons en pierre, des routes pavées, l'alphabétisation. Au sud, des maisons vétustes, de la pauvreté. L'essentiel de la technologie se concentre au centre, dans le Cirque, où vit le Zilwa et son entourage avec la présence de l'électricité, au détriment de la population. Les hérétiques, ceux qui n'ont pas choisi d'embrasser la religion ont été chassé des villages et vivent dans des conditions déplorables dans la forêt et les galeries souterraines volcaniques.

En cherchant à modifier le fonctionnement établi, Shivan va fragiliser les croyances de son peuple qui ne va pas apprécier le changement. Bref, malgré des efforts louables, il sera un piètre chef. La scène où il devra tatouer un enfant pour le bénir reflète tout à fait son règne : des hésitations, un travail assidu et malgré tout des erreurs compensées par des paroles rassurantes.

En dehors de son rôle de chef, j'ai particulièrement apprécié la description de son tiraillement d'adolescent amoureux entre Melen et Alynn que je trouve assez juste : Il aime Alynn d'un amour non réciproque, et apprécie Melen mais avec moins d'intensité. Ses décisions maladroites vont un peu corser les choses dans ce triangle amoureux mais reflètent assez bien son âge. En ce sens, cela reste un adolescent ordinaire malgré sa charge de Zilwa.

J'ai également trouvé assez intelligent que l'auteur rappelle les origines modestes du garçon pour expliquer certaines de ses habitudes ou réactions : il accorde peu d'importance à son apparence, ne sait pas lire, parle avec le coeur… L'apprentissage de la lecture donnera d'ailleurs un tournant cocasse au complot et à la recherche d'indices chez Gadar le Chaman qui m'a beaucoup amusée.

Un archipel sensoriel et sauvage

Comme dans le premier tome, l'auteur nous invite à nous plonger dans le quotidien d'une île sauvage où tous nos sens sont mis en éveil face à la nature luxuriante : odorat, ouïe, goût et vue sont sollicités à travers les mets tropicaux dévorés par le Zilwa, le chant des oiseaux ou le bruit du vent dans les palmiers, l'odeur de coco dégagée par les cheveux de Melen, la brûlure du soleil sur la peau, la moiteur étouffante de l'extérieur… On sent l'influence de l'ensemble des îles visitées par l'auteur qu'il a souhaité restituer dans cette histoire.

Par ailleurs, avec ce deuxième tome, l'auteur agrandit l'univers de l'île de Welling pour évoquer l'Archipel tout entier. A noter qu'une carte est présente en début d'ouvrage pour appréhender l'ensemble d'îles.

Le lecteur découvre l'existence de 5 îles suite à la visite de l'un des chefs à Shivan suite à son intronisation. Et tous ne lui prêtent pas allégeance ou ne vivent pas comme lui. Une des chefs, Kali s'est même désolidarisée de l'archipel afin de vivre sans le Zilwa, il y a de nombreuses années. Il existe même une île prison assez hostile, appelée l'île aux serpents, où les bannis sont envoyés survivre dans un enfer sans nourriture ni eau, devenant peu à peu des cannibales. Je gage que l'on en apprendra encore plus dans le tome 3 sur ces autres îles au vu du dénouement du tome 2.

En conclusion : Grégoire Laroque signe un deuxième tome addictif digne d'un thriller où son jeune héros apprend à ses dépends à devenir un dirigeant. Un huis-clos au suspense insoutenable qui interroge le pouvoir de la religion et des traditions et surtout la puissance de la machination politique face à la bonne volonté.

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