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Critique de ODP31


Traversée du désert, en long, en large, en travers et en chameau.

Les mémoires de guerre rapiécées de T.E Lawrence, Laurence d'Arabie pour la postérité, couvrent les deux années (1916-1918) de la révolte arabe contre les turcs. 2 ans et 900 pages pour trois bonnes semaines de lecture pour bibi d'Occitanie qui avait emporté ce classique pour un voyage en Jordanie de huit jours en se disant, prévoyant, qu'il aurait du mal à trouver une librairie en plein désert. Manquer d'eau, je veux bien mais pas de bouquins. En fait, j'aurai pu enchaîner avec un Paris Dakar en trottinette électrique pour espérer le terminer avant de rentrer.
Quel monstre ! Chaque page est un mirage, quête du point final comme celle d'une oasis, oh, oasis, ah ! J'ai ma dose de sable émouvants pour l'année. Plage de galets cet été. Tant pis pour le mal aux pieds.
Je vais la faire court, tellement il l'a fait longue. T.E Lawrence raconte comment a été fomentée et menée la révolte arabe contre l'Empire Ottoman, allié de l'Allemagne durant la première guerre Mondiale. Il raconte surtout le quotidien des escarmouches et embuscades auxquelles il a participé pour déstabiliser l'ennemi turc.
Archéologue de formation, l'historien se mua en homme d'action, épousant une cause qui devint pour lui une quête d'absolue. Elle fit sa légende et le regard de Peter O'Toole.
Ce qui m'a profondément marqué dans cette lecture, c'est la volonté de l'auteur de minorer son rôle dans l'histoire. S'il a largement contribué à la victoire et se révèle un extraordinaire stratège, il ne cesse d'être tiraillé par sa conscience concernant les ambitions cachées de son pays. Appuyer le mouvement nationaliste arabe qui veut s'émanciper de Constantinople dont le sultan appelait au Jihad en 1914, éviter tout soulèvement contre la présence anglaise dans le delta du Nil, s'assurer la maîtrise de la route des Indes, pipeauter des promesses d'indépendance qui tiendront davantage de la curatelle, et accessoirement, filouter les français dans la région au-delà des accords Sykes-Picot de 1916. Autant d'enjeux diplomatiques qui polluent les idéaux de l'homme d'aventure qui décrit si bien la honte de ses ambiguïtés dans ces pages. Petit complot de puissance coloniale au menu.
T.E Lawrence cherche donc aussi à casser son mythe, déboulonner sa statue avant que cela ne devienne à la mode, nuançant sa gloire militaire et contestant ensuite sa gloire littéraire.
Il partage par contre dans son récit sa fascination pour ses camarades arabes, nomades, fiers, fatalistes et instinctifs, pour les leaders du mouvement et notamment pour l'émir Fayçal, futur roi d'Irak, et roi éphémère de Syrie pendant 100 jours.
Dans ce récit flamboyant, il ne manque selon moi que deux choses : des femmes (pas une seule en 900 pages, cela relève de l'ascétisme), et… une carte, car on se perd vite dans le désert et sans panneaux, sans office du tourisme ou QR code sur le cul des chameaux, j'ai souvent perdu mon chemin dans ces pages entre La Mecque, Damas et Amann. Avis aux prochaines éditions.
Sans nul doute, « Les sept piliers de la sagesse » constitue un des plus beaux récits d'aventure du 20 ème siècle. Une lecture exigeante qui demande la patience d'un bédouin qui passe le balai devant sa tente un jour de tempête de sable mais qui parvient à magnifier des terres désolées.
Au fait, qui se souvient de la chanson qui a mal vieilli: "Fuis... Lawrence d'arabie" chantée par Annabelle en 1987. Ecoutez-là, elle vous hantera toute la journée.
Sinon, joli voyage. Je me suis pris pour Indiana Jones à Petra. On fait ce qu'on peut. Je n'ai pas les yeux de Peter O'Toole.


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