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Critique de Sabinedarroze


« Qu'il emporte mon secret » ce livre écrit par Sylvie le Bihan Gagnaire ressort en poche ( sorti en 2017). Un ami m'avait dit qu'il était difficile. Impossible de reculer devant cette histoire de viol, car il s'agit bien de cela, mais surtout du chemin de reconstruction après « Ça ». Il s'agit pourtant d'un roman, mais qui puise dans le vécu de la romancière.
Hélène, une écrivaine à succès est violée alors qu'elle est animatrice dans un camp d'ados. Elle ne dit rien ou presque et ne porte pas plainte. Sa famille, puis un gendarme l'exhortent à conserver le secret. Plus tard, à l'occasion d'un salon, elle est attirée par un jeune auteur, Léo, avec lequel elle partage une nuit d'amour. Quelques années plus tard, elle identifie son agresseur. Elle se retrouve sur le point de témoigner contre lui à son procès. Dans l'attente de son témoignage, enfermée dans une chambre d'hôtel, armée de ses cigarettes, les souvenirs, les dommages irréparables sur son psychisme et sur sa construction de femme, sa confiance, sa capacité d'aimer ou d'être heureuse remontent à la surface et la submergent. Elle écrit alors une longue lettre à son jeune amant d'une nuit et ne lui cache rien.
Le passé enfoui à grands efforts de caractère et d'obéissance rejoint le présent qui la fait vaciller et la fait douter de la solidité de cette vie parallèle qu'elle s'est efforcée de construire derrière les lézardes profondes que cet accident a causées. Fauchée à la base de sa construction, de femme, d'amoureuse, d'amante elle s'efforce de révéler les dommages de cette vie en double. Cet exercice de vérité, de sincérité intime, de mise à nu de son traumatisme est ciselé dans une plume-scalpel, précise, chirurgicale, aussi glaçante qu'intense. Aucun mot de trop, on ne peut en changer aucun. Ils sont tous indispensables, nécessaires, justes et à leur place. Aucun terme déplacé, violent, malaisant et pourtant l'intensité des souffrances est profondément sincère.
La vérité nue de la confession épistolaire confère à la cruauté inconcevable de ces quelques 10 lignes consacrées réellement à ce moment où tout bascule, une élégance presque provoquante, mais épargne le lecteur de tout déballage indécent.
Le traumatisme d'Hélène surgit, sans avoir été traité, comme un diable de sa boîte. Seules les distances qu'elle a imposées à son « nouveau monde » (l'alcool, les amants, la provocation…et la lettre, ultime distance avec cet amant charmant loin de sa chambre d'hôtel) lui ont permis de construire malgré tout, pour avancer, pour donner le change, pour faire comme on lui a dit, mais surtout pour faire comme elle peut avec ce qui lui reste d'elle. Totalement bouleversant!
Ce roman est aussi un thriller ; un criminel est sur le point d'être jugé. La fin vous coupe le souffle et les jambes, dernier coup de lame.
Une lecture, intense, profonde, forte et bouleversante.
Difficile de dire que j'ai aimé. J'ai reçu ce livre comme un uppercut et j'en conserve l'hématome profondément tatoué à l'âme.
A lire incontestablement et à faire lire.
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