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Critique de darkmoon


Voici un thriller engagé qui nous montre les pratiques peu glorieuses des pays riches envers le continent africain. Les laboratoires pharmaceutiques soucieux de développer leurs nouveaux médicaments rapidement et à moindre frais n'hésitent pas à recourir à l'expérimentation humaine sur des populations frappées par la misère. le paradoxe est très douloureux car ces mêmes médicaments sont destinés à sauver à terme la vie d'autres gens. D'un point de vue très général un tel cynisme peu se défendre mais humainement il est insoutenable. Les gouvernements et tous leurs dignitaires ferment les yeux sur ce lucratif business allant même jusqu'à faciliter les opérations si besoin. Heureusement quelques individus courageux s'insurgent au travers d'associations humanitaires. le grand mérite de John le Carré est d'avoir porté le dilemme au sein d'un couple où Justin Quayle fera son examen de conscience de la façon la plus douloureuse qui soit après que son épouse ait été assassinée pour avoir trop fouiné dans les affaires d'un riche magnat local.

Sous des dehors de roman à suspense et engagé, John le Carré orchestre avec maestria la savante alchimie d'une histoire à l'échelle mondiale, à savoir le lobbying pharmaceutique et plus généralement la condescendance effroyable avec laquelle l'homme "civilisé" traite le "sauvage" africain, et de l'histoire personnelle de deux êtres, celle d'une histoire d'amour (manquée ?) entre un diplomate résigné et sa jeune femme aux idéaux humanitaires. de leurs instants rares d'intimité, comme volés avant que ne les rattrape la fatalité...Car c'est avant tout la psychologie des différents personnages qui fait la force du récit et entretient les ambiguïtés. le protagoniste principal, Justin, est le flegme britannique personnifié. Constamment calme et maître de lui-même, respectueux des règles de bienséance et de ses supérieurs hiérarchiques. Sa principale passion est le jardinage, prendre soin de ses plantes vertes, activité qui symbolise bien son désir de ne pas importuner autrui et de s'enfermer dans sa petite bulle de codes moraux, docilement et gentiment. Ce n'est qu'au moment où cet homme qui a passé sa vie à contrôler tous ses sentiments perd pied qu'il les extériorise enfin. Tessa, son épouse, est passionnée, engagée, c'est une idéaliste. Elle a des convictions et n'hésite pas à les faire entendre ni à agir en conséquence. Personnage fascinant, entier qui s'intéresse aux autres et rêve de justice. C'est donc le récit d'un couple dont l'avenir est sacrifié pour une cause humanitaire, où l'épouse portait la culotte et faisait des cachotteries à son mari pour le préserver. Heureusement, la mort de Madame Quayle agit comme un électrochoc sur son époux si bien élevé. Une passion évidente les unissait, le mariage était précipité mais c'est à la mort de Tessa que Justin apprend réellement à la connaître et à la comprendre. Enquête politique mais enquête humaine également et qui nous fait voyager à travers le monde en faisant un arrêt prolongé dans les magnifiques paysages du Kenya.

Un très bon roman donc, qui reflète bien le sujet et la problématique de la mondialisation, ses effets pervers et inégalitaires. Une passion pour une cause humanitaire qui se transmet au sein d'un couple, prêt à tout pour se protéger l'un l'autre. Une belle leçon d'humanité et d'amour.
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