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Critique de gill


gill
10 septembre 2022
Comme Anatole le Braz avec lequel il a contribué, en 1898, à fonder l'Union Régionaliste Bretonne, Charles le Goffic a parcouru la Bretagne.
Comme lui, il en a extrait l'essentiel de son oeuvre.
Mais, le Goffic, à l'inverse d'Anatole le Braz, n'était pas un rêveur.
Son oeuvre, si elle célèbre aussi l'âme bretonne, pourtant s'attache plus à décrire la réalité du "pays" et à en peindre les clartés comme les ombres.
Ce qui Vaudra à le Goffic de parfois s'attirer les foudres des régionalistes les plus "convaincus".
Ce livre, "sur la côte", qui paraît être une réédition augmentée ou une compilation, contient quatre grands chapitres bien distincts :
"l'âme des phares", "l'île de Sein", "la vie du banc" et les faucheurs de la mer".
"Entre Paimpol et Locquémau, dit un proverbe breton, là est le lit de la mort".
La mer y est un champ de bataille entre terre et océan.
Dix phares principaux y ont été élevés aux endroits les plus exposés.
Sur le tertre du Rosédo, ces dix feux, s'allumant simultanément au crépuscule, sont tous visibles à la fois !
Charles le Goffic, sur une petite musique de ressac et après une belle introduction, entreprend de sonder l'âme des phares bretons, de tous les phares bretons ...
Le dernier que l'on aperçoit en quittant l'Europe est celui d'Armen !
"Qui voit le phare finit son quart", dit un proverbe marin.
Ces premières lignes du livre ont été écrites , en un temps où l'automatisation des phares était encore à peine envisagée.
Ce qui leur donne des airs d'actualité et de reportage auxquels s'ajoutent aujourd'hui un vernis historique teinté de romantisme.
La deuxième partie, "l'île de Sein", est le compte-rendu d'un voyage de quelques jours, la sombre peinture à l'huile d'un mois de décembre à l'auberge dont l'enseigne est "à l'abri de la tempête" ... et de la lumière !
Le Goffic arrive de Paris où les dernières nouvelles d'une terrible tempête ont serré les coeurs.
On y parle de 22 maisons détruites, de famine, de digues crevées et de submersion totale et définitive de l'île !
Malgré cela, la prose de le Goffic n'est pas toujours à l'avantage des îliens.
Il relate ce qu'il voit, répète ce qu'il entend et décrit des moeurs étranges venus d'un autre temps, et parfois en marge du code civil.
Le folklore et le tourisme n'ont pas ici encore acquis droit de cité.
La troisième partie, "la vie du banc" est de la même eau, de celle qui coule d'un réalisme sans concession.
Elle contient deux tableaux de la vie terreneuvienne qui prennent vie en passant un 2 décembre par le Vieux-Bourg, près de Miniac-Morvan ...
La quatrième et dernière partie, "les faucheurs de la mer", vient se frotter aux "jargoteurs" de l'île aux moines, de l'autre île aux moines, en face Ploumanac'h.
D'ailleurs, il est dit ici que tous les ploumanacains sont des sans coeurs et des forbans !
Voilà, c'est dit.
"Oui mais le plus de pitié que l'on connut sur ma terre,
Délandélinda, c'est la vie du goémonier,
Dans la fumée jaune et salée, à déhaler sur la grève,
Brûlé par l'été, à racler sur les rochers.
C'est vrai pourtant, c'est vrai" ... a, depuis, chanté le groupe nantais Tri Yann.
Cette dure vie de labeur est ici décrite et racontée en compagnie de Mône Lheveder, chanteuse à son heure, phonographe qui ne marche que si elle est arrosée ...
A mon sens, ce livre "sur la côte" de Charles le Goffic forme un tryptique avec "la Bretagne - au coeur de la race" et "Brocéliande", deux autres de ses livres.
Sans jamais renier l'imaginaire breton, il s'en éloigne pourtant afin de capter une réalité loin de tout folklore, de saisir sans concession cette âme bretonne profonde et mystérieuse que le tourisme et la vie moderne ont fait pâlir jusqu'à presque la faire disparaître.
Et la Bretagne, toujours, repense son histoire le temps d'un livre ouvert, d'un livre de Charles le Goffic ...
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