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Critique de Sovane


"Random Family" est une enquête menée sur plus d'une décennie par la journaliste Adrian Nicole LeBlanc. Elle retranscrit dans ce livre son expérience unique d'immersion dans le Bronx, auprès de la communauté portoricaine.
Cette saga familiale captivante et bouleversante est devenue un classique du genre dit "Nouveau nouveau journalisme". Passée un peu inaperçue au moment de sa traduction, elle est aujourd'hui rééditée, agrémentée d'une préface de Florence Aubenas.

Adrian Nicole LeBlanc répond au départ à une demande du journal qui l'emploie. Elle est chargée de couvrir le procès du jeune dealer Boy Georges, une vedette du milieu de la vente d'héroïne. Mais très vite la journaliste de 25 ans va se désintéresser de son sujet imposé pour se focaliser sur les femmes qui l'entourent. En effet, les hommes ne font pas long feu dans le quartier. La mort ou la prison les attendent à chaque coin de rue, au mieux la dépendance. Un jeune garçon né et grandit dans le Bronx n'a qu'une espérance de vie de 35 ans. Ce sont donc les femmes, vivant dans leur ombre, qui incarnent les véritables chefs de famille.

Alors que dans la plupart des "sagas de la chnouffe" elles sont considérées comme des personnages secondaires, voire même des éléments du décor, Adrian Nicole LeBlanc en fait de véritables héroïnes. Ainsi Lourdes qui prend peu à peu le devant de la scène, et Jessica, sa fille, devenue la "régulière" de Boy Georges. Nous suivons avec l'auteur l'enfance et le début de carrière du jeune homme. Il passe de guetteur à revendeur, puis devient producteur en un temps record. Une ascension fulgurante à l'américaine qui fera du dealer un modèle et un mythe, même des années après son incarcération.

Ce texte se dévore comme une telenovela. L'élégance et la neutralité du style de l'auteur renforcent l'acuité de son regard. Adrian Nicole LeBlanc se garde de porter le moindre jugement et se place en position de simple narratrice, ce qui conforte la pertinence de son observation. On découvre ainsi le quotidien des habitants de ces ghettos, dans lesquels on grandit trop vite : les jeunes filles deviennent mères à 15 ans, puis grand-mères à 30. La plupart passent complètement à côté de leur vie, elles doivent élever leurs enfants seules, sans autre revenu que les allocations. On s'attache à ces femmes qui tentent de survivre avec le peu qu'elles ont, comme Coco, dont l'acharnement à protéger ses filles ne faiblit jamais, ou Jessica, restée une adolescente même après avoir purgé sa peine de prison.
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