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Critique de Plumefil


Agnès Ledig est une autrice que je laissais volontairement de côté, voyant ses livres classés régulièrement dans les feel-good books. Pour avoir essayé ce genre de littérature, à part de rares exceptions, il me déçoit par son habitude à jouer sur la sensiblerie et, il faut bien le reconnaître, par une narration pas des plus soignées. N'est pas Hugo, Zola ou Rimbaud qui veut, mais il y a des limites à la facilité.

"La toute petite reine" est arrivé dans un colis d'échange de livres, au sein d'un groupe restreint d'amateurs auquel j'ai la chance d'appartenir. Je l'ai radicalement mis de côté avec la ferme intention de lui laisser poursuivre son périple vers une autre destination, sans lui accorder d'attention. Les préjugés et les cases, bien carrées, dans lesquelles on entasse les gens comme les choses m'agacent. Aussi, allant à l'encontre de mon premier geste de refus, j'ai décidé de faire la connaissance de cette petite reine, sans lire la quatrième de couverture. À se jeter dans l'inconnu, autant le faire sans filet. Et puis, perdre un à deux jours à lire un texte niais n'est pas une catastrophe, seulement une façon d'entériner le choix de ne plus jamais recommencer. Je me suis donc lancée... à reculons !

Les débuts ne m'ont pas rassurée. Les premiers chapitres s'enchaînent, avec une succession de narrateurs apparemment sans aucun lien entre eux ou si peu. L'expérience partait plutôt mal. Impossible de poser mon attention sur quiconque en particulier. J'avais l'impression de m'éparpiller sans me fixer nulle part et cet imbroglio m'a beaucoup gênée. Au moins cinq personnages s'expriment indépendamment les uns des autres, utilisant la première personne. Puis, petit à petit, le récit a pris du sens et s'est organisé pour, enfin, profiter pleinement de l'aventure proposée. Et quelle aventure !

de nombreux thèmes importants sont abordés avec simplicité et franchise : le deuil, le stress post-traumatique, la résilience, l'alcoolisme, le racisme, les relations humaines en général. Évidemment, la romance naissante entre deux êtres écorchés par la vie est très téléphonée, faisant fi de la déontologie paramédicale, cependant elle m'a semblé dépourvue des niaiseries habituelles. La découverte du parcours de chacun se révèle, peu à peu, au fil des pages. Qui sont-ils ? Que veulent-ils ? Quelle est leur histoire ? Quels sont leurs rêves, leurs espoirs, leurs frustrations et leurs projets ? Tous les rouages de ce petit monde, grippés par l'incompréhension, se mettent doucement en route, grâce au lubrifiant universel, l'amour des siens et celui des autres, avec l'acceptation de la différence sans aucun jugement. Seul un vieux monsieur, assis sur un banc, surveillant une maison délabrée chargée des souvenirs et des secrets, paraît extérieur aux protagonistes, finalement attachants, et pourtant...

Une question de psy a particulièrement retenu mon attention à laquelle je n'ai toujours pas trouvé de réponse personnelle claire : « Quel est votre verbe de vie ? ». Sujet de réflexion intéressant !

"La toute petite reine" n'est pas un coup de coeur, mais, pour moi, ce roman est bien loin du flop que j'appréhendais. Il est toujours bon de revenir sur ses idées reçues, au risque d'avoir une belle surprise. C'est une lecture que je qualifierai de "doudou", malgré les sujets difficiles abordés. Elle présente régulièrement des poèmes au travers desquels on sent battre le coeur et les émotions de leur créateur, prouvant, s'il est besoin, qu'il ne faut jamais se fier aux apparences. Au moment où il m'est bien difficile de me concentrer sur la lecture en général, ce roman m'a diverti en me faisant du bien sans prise de tête.

Je retiens que le genre feel good est, en fait, un fourre-tout où l'on trouve du bon comme du mauvais. À chacun de faire son tri personnel en fonction de son niveau d'exigence et de son épisode de vie. Agnès Ledig a peut-être une bibliographie inégale ou étale, proposant de nouveaux ressorts d'intérêt dans chacun de ses livres ou utilisant toujours les mêmes ficelles. Je ne peux pas encore me prononcer, mais je prendrai plaisir à vérifier plus tard. Par ce premier roman que je découvre, je la ressens comme une écrivaine de l'humain, et j'ai aimé ce que j'ai lu.
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