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Citations sur Dead girls (3)

Un soir d’hiver à Vancouver, le parking d’un lycée, l’intérieur de ma Chevette éclairé par le plafonnier. Dehors, le ciel s’assombrissait, semblant aspirer toutes les couleurs du paysage : les sapins, l’herbe, les montagnes, tout se ternissait en ombres fades et métalliques. Je remontai ma vitre et allumai la radio, changeait plusieurs fois de fréquence, puis l’éteignis. Trop de chansons intimes, sentimentales, pour une soirée grise et solitaire – amour non partagé, amour vengé, nouvel amour, mais bon sang, on s’en fichait ! Je regardai les deux comprimés d’amphétamines dans le creux de ma main et soupirai.

J’étais là pour rendre service à ma voisine Janet. Janet la Guimauve, l’éternelle enjouée, toute rose, assez gentille pour lever des fonds destinés à une campagne de sensibilisation sur la drogue à l’école de son fils. L’ironie de la chose ne m’échappait pas.

Dans la lumière jaune tamisée, les comprimés étaient d’un bleu parfait. Attrayants comme un ciel d’août, tentants comme la piscine du voisin. Je les avalai tout rond. J’ajustai ma fausse coiffe d’infirmière. Sortis de la voiture.
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La cabine téléphonique se trouve à une intersection, dans un quartier animé plein de boites de nuit. Bien qu’on soit en février et que la nuit tombe à peine, des filles en minijupes tapinent sur le trottoir, serrant étroitement leur fausse fourrure contre elles. Elles rôdent, puis se précipitent sur les voitures qui ralentissent. Certaines écument le trottoir, font un pas stylé en arrière pour s’offrir à des passants. Quand un homme parait intéressé, la fille ouvre son manteau, lui donnent un aperçu. De loin, tu étudies ces filles, leurs corps minces, jeunes, leurs poses assurées, leurs cheveux apprêtés avec soin. Tu es soulagée de voir que la plupart d’entre elles ont l’air en bonne santé, fortes, qu’elles se sourient et plaisantent entre elles. Tu observes leur façon de garder les jambes bien tendues, comme si elles exécutaient une figure de gymnastique quand elles se penchent à la fenêtre ouverte des voitures ; tu remarques que certaines d’entre elles ne se donnent pas la peine de mettre des sous-vêtements. Tu abordes les filles l’une après l’autre, en prenant bien soin de ne pas interrompre leurs transactions. Tu leur dis « je suis à la recherche de ma fille », et tu leur montres le Polaroid. Parfois elles secouent la tête sans avoir regardé la photo, parfois elles la saisissent et la fixent d’un regard triste.
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A cause de ses grands pieds, Sally trébuchait tout le temps, tombait, revenait avec des bleus et des écorchures aux genoux. Elle faisait de chaque accident un supplice, avec pleurs et hurlements, jusqu’à ce que son père sorte et passe un bon savon au trottoir. Il revenait à la maison le visage sérieux et lui disait : « Si ce trottoir te cause encore des ennuis, fais-le-moi savoir. »
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