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Critique de Milllie


Georgette c'était la présence rassurante et indispensable de l'enfance de Déa, la narratrice, petite fille issue d'une famille libano syrienne exilée en France. Georgette, la nounou, la seconde maman, celle qu'on n'aurait jamais osé appeler la bonne. Georgette la consolante, l'énergique, toujours au travail et toujours présente pour les enfants, Déa et son grand frère. Et puis du jour au lendemain Georgette est partie et Déa s'est retrouvée seule. Devenue grande, elle essaie de dénouer les liens complexes entre Georgette et sa famille et de reconstituer son histoire.

Georgette est un petit livre de même pas 200 pages mais c'est aussi une histoire bouleversante qui vous restera longtemps en tête. Déa Liane raconte son histoire et avec beaucoup d'honnêteté et de franchise tente de faire le point sur l'histoire de ces femmes vouées à sacrifier leur propre vie pour élever des enfants qui n'étaient pas les leurs et dont elles pouvaient être séparées à tout moment. le roman est construit comme une série d'instantanés, de courtes scènes qui vont nous donner à voir de petits pans de l'histoire de cette famille. le père, accaparé par son travail et ses voyages d'affaires, souvent absent, la mère qui met en scène sa famille et passe son temps caméra à la main pour immortaliser les bons moments et les scènes clés et puis Georgette, Georgette qui dans la petite enfance de Déa et son frère était finalement celle qui les nourrissait, les rassurait, les berçait, apaisait leurs cauchemars et leurs peurs. Georgette dont la position dans la famille n'était pas clairement définie tant aux yeux des enfants elle semblait avoir toujours été là et faire partie du noyau familial alors que pourtant quelques scènes clés viendront rompre l'illusion et la remettre à sa place d'employée, de domestique, de "fille" comme on disait à l'époque, bref la bonne.

Le ton adopté par l'autrice est très juste, elle n'essaie jamais d'enjoliver les choses mais ne se place pas non plus dans une posture faussement compatissante. de chapitre en chapitre, elle va simplement reconstituer son histoire et celle de Georgette à l'aune de ce qu'elle comprend maintenant devenue adulte. C'est tantôt très drôle (Georgette super héroïne chassant les scorpions qui menacent les enfants), tantôt ironique quand on sourit de la maman s'évertuant à mettre en scène sa vie pour laisser des souvenirs impérissables à la caméra et puis au fil des pages, à travers à la fois la nostalgie de cette époque et tout ce qu'on devine en filigrane de l'injustice sociale et de la position compliquée que tient Georgette, le livre devient franchement bouleversant. Georgette a mis sa vie en sourdine pour se dévouer à cette famille qui n'est pas la sienne, elle n'a d'ailleurs pas vraiment connu d'autre vie ni eu le choix, elle les suit lors de leur exil en France, sans parler un mot de français et en abandonnant ses racines. Et puis du jour au lendemain l'illusion va se rompre, Georgette va rentrer au Liban et le lien qui l'unissait aux enfants sera définitivement brisé.

C'est un très beau roman que ce Georgette, écrit d'une plume douce et évocatrice, pleine de tendresse et d'humour. Un livre qui redonne une voix à ceux que l'on n'entend jamais, ceux qui ont longtemps fait partie du paysage sans qu'on s'interroge sur leur présence, leur vie ou leurs souhaits. Une belle réussite pour un premier roman et un titre à découvrir !
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