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Critique de ATOS


ATOS
23 décembre 2016
Ce livre entre dans L Histoire par la grande porte de la littérature.
L'année dernière le documentaire « Kizu les fantômes de l'unité 731 » de Serge Viallet ( 2004 ) m' avait fait pénétrer dans l'horreur des faits.
« L'homme qui mit fin à l'histoire » de Ken Liu est un roman classé sciences fiction, SF.
Et l'intelligence de la démarche littéraire de Liu c'est justement d'avoir pris appui sur la fiction pour nous renvoyer l'écho du passé. de notre passé. Il fallait cette distance pour que toutes ces questions soient audibles. Il fallait ce retour visuel, factuel, textuel.
Ce travail « en années lumière » pour faire le point sur cette nuit .
Lisez ce livre, documentez vous sur l'histoire de l'unité 731.
Pourquoi, me demanderez vous ? Pourquoi remuer le passé ?
Mais pour savoir. Savoir et comprendre davantage la suite de l'histoire.
Un peuple qui aujourd'hui n' a pas la possibilité de faire face à son histoire, qui laisse le mensonge régner, qui accepte l'occultation des faits au nom d'une « tranquillité », et de ses petits arrangements politiques ou économiques, n'aura demain aucune crédibilité, aucune autorité, pour agir face à l'histoire qui se déroule devant ses yeux.
Ce livre devra être étudié dans tous les cours d'histoire, et également doit être remis entre les mains de tout futur diplomate. Mais plus largement entre les mains de tous.
Il est le sujet d'une étude qui permet de réfléchir sur ce qui doit être rapporté, remonté des filets de la mémoire , et de sa conservation.
Comment analyser, qui juger ? , les peuples, les pays, les gouvernants ? Quel devoir avons nous envers les victimes ? Comme opérer l'archéologie des faits ?
Objectivité, subjectivité, à qui revient le soin de porter témoignage ? Quelle est la généalogie de la souffrance ? L'émotion doit elle être absolument soustraite des faits ? Doit on rendre l'histoire présentable au risque de la rendre méconnaissable ? Doit on restaurer le passé ?
Au nom de qui, au nom de quoi faut il continuer les recherches, quelle doit être la déontologie des acteurs, des rapporteurs, des conservateurs ?
Histoire, politique, géographie, qui peut prendre contrôle du passé ? A qui demain appartiendra le passé ?
Le témoignage historique est une narration. Narration constituée de signaux enregistrés par le cerveau comme nous le rappelle Ken Liu.
Cela ne constitue pas une illusion. Qui prendrait contrôle des cerveaux aurait-il demain contrôle du passé ? Doit on sécurisé
Qu'en sera-t- il de nos cellules miroirs ? Seront elles dirigées ? Notre empathie peut elle être développée par l'amplification des témoignages, des images ? Notre émotion peut elle être manipulée ?
Quantité, qualité des informations. Filtrage, analyse des informations. Qui supprime qui confisque qui censure le passé, ce passé qui est toujours présent d'un instant ?
Quel place doit prendre le passé dans notre futur ? « Plus de seize millions de civils ont péri en Chine lors de l'invasion japonaise » . Seize. Seize millions.
Ce nombre n'est pas concevable pour un esprit humain. Pas plus que l'horreur des camps d'extermination instaurée par le nazisme, pas plus que les victimes d'Hiroshima et de Nagasaki, pas plus que le nombre de toutes les victimes civiles de tous le génocides connus et ceux qui malheureusement sont toujours à venir. Car la boucherie continue. Voyez Alep. Voyez ce qu'il en reste.
Alors est-ce que la science doit avoir place dans ce débat ? Est ce suffisant de radiographier les momies égyptiennes, de repeindre des cathédrales, de restaurer le plafond de la chapelle Sixtine, de reconstruite pour la énième fois Lascaux... est ce suffisant ?
Quel tombeau doit être désigné comme étant digne de science ?
Beaucoup de questions dans ce livre. Oui livre de science fiction. Grand auteur, grand livre.
Ce livre fera débat je l'espère. Il ne demande que cela, je crois.
Il ne demande pas que justice soit faite, mais qu'au moins les faits soient connus.
Après ce que nous devons en faire ? , cela nous concerne tous, parce que nous le voulions ou pas notre mémoire est notre patrimoine. Et il n'y a pas de mémoire d'état, le menteur est comme le flatteur il vit au dépend de ceux qui l'écouteront.
Manipulation des informations, des mémoires, liberté d'information, de recherche.
Pourquoi demain faudra t ile encore parler du passé du l'unité 731 ? Pour combattre tous les négationnismes dont les têtes repoussent continuellement telles de hideuses gorgones.
Parce que parler demain encore du passé, c'est donner un avenir à notre présent.
Vivre sans oublier doit être un droit pour chacun, afin qu'il soit concevable que cela devienne un jour un devoir pour tous.
J'ai découvert Ken Liu grâce aux lecteurs de Babelio, grâce à leur témoignage de lecture. Je les remercie tous quelque fut ou sera leur analyse.
Parce qu'ils ont pris la peine de transmettre leur témoignage, de donner leur propre avis et de les confronter aux autres.
Pourquoi parler des livres ? Parce qu'ils surgissent du passé ou qu'il nous parle du futur ils nous offrent toujours un avenir à toutes nos lectures.

Astrid Shriqui Garain

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