La bande dessinée de
Johann G. Louis s'ouvre avec une douce ambiance bleu nuit. Otis s'approche discrètement d'un club réservé aux noirs. Il est guidé par la musique et observe avec émerveillement la joie qui anime la danse des adultes. Brusquement, un homme rentre dans le café et hurle l'ordre de fuir. La menace arrive, Otis ne la voit pas. Il prend ses jambes à son cou et retourne chez lui, plongeant sous sa couette comme si elle allait le protéger. Ce qui l'a vu, ce que son esprit a imaginé est un cauchemar.
Cette scène d'ouverture illustre parfaitement le ton de cette BD. Les couleurs invitent à l'histoire par leur beauté et leur douceur. Les aquarelles plantent des décors où la végétation règne. Les traits des dessins sont d'une telle finesse que les visages gagnent en expressivité et les lieux en vie. Au milieu des espaces urbains ou naturels, les personnages virevoltent, courent, se débattent, se cachent pour s'amuser. Et en filigrane, il y a cette menace qui prolifère. Les personnages centraux, trois enfants, sont entourés par cette menace, la ressentent sans réellement prêter attention à elle. Pourtant, sa seule présence marque peut-être la fin de leur enfance, de leur innocence.
Otis et Red veulent s'amuser et se fichent des contraintes. Ils sont amis et rien n'est plus important. L'arrivée de Shelley confirme l'importance d'être ensemble. le duo devient trio. Chacun révèle ses particularités, ses failles et ses envies. Régulièrement, ils oublient l'heure et le temps file. Mais leur présent les rattrape. La mère de Red lui rappelle qu'il ne doit pas traîner avec des noirs. Celle de Shelley ferme les yeux sur l'épuisement des finances. Celle d'Otis voudrait qu'il aille à l'école. A voir cela, on comprend qu'ils préfèrent s'amuser.
L'auteur porte sur eux un regard tendre et rend hommage à la vigueur de la jeunesse, à la joie d'être ensemble. Pourtant, il y a ce racisme, cette violence qui imprègnent les planches et laissent un goût amer au fur et à mesure de l'histoire. Les enfants vivent cet été sans penser aux lendemains. Peut-être comprennent-ils que ce sera le dernier et que leur avenir est assombri par l'aveuglement et la violence de la société des adultes.
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