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Critique de CardShark


Avant que Lovecraft ne fasse trembler le monde avec les indicibles horreurs d'outre-espace du Mythe de Cthulhu, il a écrit les nouvelles du Cycle du Rêve.

Internet aidant, trichons un peu pour l'atmosphère adéquate, baissez les lumières, ouvrez les liens suivants:
http://rain.simplynoise.com/
plus
https://www.youtube.com/watch?v=55W7k5UkrIc

Plus qu'une collection d'histoires, c'est avant tout pour moi une ambiance. Tout est dans le ressenti, le viscéral, un ovni dont je peux lire quelques pages au hasard, m'immerger dans cet univers, et reposer, satisfait. Le genre de livre qu'on prend plaisir à lire un de ces soirs de début d'hiver par 38 de fièvre, sonné, les yeux en feu, planqué frissonnant sous une couette avec un thé brûlant pas loin. Et si possible une pluie battante martelant la fenêtre.

Les premières courtes nouvelles éclairant une facette ou une autre de ce monde allant du gentiment pastoral d'un village de Nouvelle-Angleterre au grandiose exotisme des Dieu de la Terre dans leur cité d'onyx de Kadath loin au nord, dans le désert de glace, de la simplicité de chats lézardant au soleil dans la ville d'Ulthar à la monstruosité grotesque des Goules, Gugs souterrains et autres Maigres bêtes de la nuit peuplant les recoins les plus noirs de ce monde. Le décors est posé en douceur. La prose volontairement terne et sèche de ses écris plus connus, qui fait dire à bien des lecteurs du Mythe de Cthulhu, que Lovecraft ne sait pas écrire, cède la place ici à un lyrisme fou. Gratuitement verbeux diront sans doute certains, mais pour moi ça marche. Ca donne des sensations de texte sans âge, une légende ancienne dont on ne perçoit qu'un infime reflet teinté de la plus absolue mélancolie. Lovecraft cite Baudelaire en introduction à Hypnos, on discerne sans mal qu'il partageait beaucoup des sentiments de l'auteur. Il partage ses épreuves et ses peurs (parfois à la limite de l'obscurantisme nauséabond pour le lecteur moderne), et son dégout du monde moderne.

Le temps fort du livre étant bien sûr les trois textes ayant pour protagoniste Randolph Carter, La Clé d'Argent, A travers les Portes de la Clé d'Argent, et en particulier La Quête Onirique de Kadath l'Inconnue (bon sang, rien que les titres sont pour moi une invitation !), où Carter, rêveur accompli, alter-ego de Lovecraft, explore sans relâche le monde du Rêve pour en rencontrer les Dieu de la Terre dans leur cité loin au Nord et leur soumettre ses demandes. Pour moi il s'agit d'une des d'aventures les plus incroyables que j'ai jamais lu, un héro d'une obstination inépuisable, un monde aussi magnifique que terrifiant, extravaguant, porté par le talent évocateur de Lovecraft.

Le recueil se conclu magnifiquement, avec Azathoth, courte ébauche de texte jamais achevé par l'auteur concluant ce voyage sur trois points de suspension, invitant le lecteur à rêver sa suite.

Ces textes, dont bon nombres ont déjà été publiés, dispersés dans les multiples recueils de la collection J'ai Lu consacrés à Lovecraft, ont reçu pour cette édition une nouvelle traduction par David Camus joliment dépoussiérée (quoi que l'ancienne, bien que souffrant de certaines ennuyeuses erreurs de traduction, n'a pas à rougir excessivement en ce qui concerne le style), une organisation des textes parfaites, agrémentée d'une préface qui mérite largement la lecture.

De l'exotisme, de l'évasion, une prose flamboyante et un soupçon de frissons. Probablement le meilleur moyen de découvrir Lovecraft.
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