AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de clude_stas


En 1893, Victor Horta, un jeune architecte belge, construit pour son ami Emile Tassel une maison de maître à Bruxelles. Avec ses différentes innovations – matériaux, usage de la lumière, rationalisation et fonctionnalité des éléments intérieurs – ce bâtiment est aujourd'hui considéré comme le manifeste d'un nouveau courant architectural : l'Art nouveau. Par la suite, Horta recevra différentes commandes de chefs d'entreprise ou de financiers et dessinera pour eux tous les éléments des bâtiments : de la porte d'entrée aux cheminées, en passant par la rampe d'escalier ou les clenches des portes. Stylistiquement, il utilise un vocabulaire graphique directement reconnaissable : inspiré par la végétation, il est basé sur la ligne en coup de fouet, un jeu de courbes et de contre-courbes. Bientôt, il sera suivi par d'autres architectes comme Paul Hankar, Paul Saintenoy ou Henry van de Velde. A Liège, Gustave Serrurier-Bovy dessinera du mobilier peut-être moins élégant que celui dessiné par ses collègues bruxellois, mais plus résistant.
Le succès de l'Art nouveau est lié à la montée sociale d'une nouvelle bourgeoisie, progressiste et férue de nouveautés techniques. Elle fit construire toute une série de bâtiments, essentiellement des maisons personnelles mais également une immense Maison du Peuple à Bruxelles. Ce chef-d'oeuvre a été honteusement détruit en 1965, en dépit de pétitions et de vives protestations des intellectuels. L'Art nouveau était trop lié à la Belle Epoque, à laquelle la Première Guerre Mondiale mit fin. Et donc en se débarrassant de la société d'avant-guerre, on jeta le bébé avec l'eau du bain : l'Art nouveau n'était plus à la mode. Aujourd'hui, il ne subsiste plus que quelques éléments épars de ce qui fut un des fleurons de l'architecture bruxelloise. La Maison du Peuple est doublement morte.
Ce superbe ouvrage en quatre langues nous présente la capitale belge pendant vingt années au tournant du XIX° siècle. Une ville dynamique par son urbanisme nouveau, destinée à une société nouvelle, libérale et socialiste (selon les sensibilités). L'architecture se taille la part du lion, de l'éclectisme historiciste à l'Art nouveau, sans oublier les prémices de l'Art déco (le Palais Stoclet date de 1905 à 1911). Et Pierre Loze nous fait pénétrer dans de nombreux bâtiments encore aujourd'hui fermés au public. Mais ne sont oubliés ni la peinture (Montald, Ciamberlani, Khnopff), ni les sfraggite (Cauchie), ni la sculpture (Lalaing), ni le vitrail, ni les céramiques (Boch Frères), ni les mosaïques, ni l'art des jardins. Enfin, si les murs de Paris s'ornent des affiches de Mucha, Bruxelles n'a pas à rougir des créations de Privat-Livemont. Bref, un aperçu d'une métropole qui vit sous les feux de la rampe grâce à Léopold II, le roi bâtisseur, mais également grâce à l'apport financier du Congo belge, colonie d'Afrique centrale. Et tout un art de vivre renaît ainsi sous nos yeux émerveillés – les photographies d'une grande qualité sont de Vincent Merckx.
Une société assise sur un volcan, peut-être bien, mais une société qui nous a laissé le Falstaff, le Pavillon Lambeaux, les Magasins Waucquez (actuel Centre belge de la bande dessinée), les serres de Laeken, la Tour japonaise, le Pavillon chinois. La Belle Epoque n'était qu'insouciance pour certains. Mais, en 1885, Emile Zola publia « Germinal » et donna au monde des travailleurs une visibilité jusque-là jamais atteinte. Un vent de changement s'annonçait.
Commenter  J’apprécie          20



Acheter ce livre sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten




{* *}