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Critique de colimasson


Pour Mailer, le roman a le pouvoir de « créer des histoires d'un meilleur niveau en ajoutant au réel l'invérifiable et le totalement inventé ».


Mon intuition me dit que chez Mailer, les parties cul relèvent de la plus pure fantasmagorie nombrilesque. Disséquons un peu l'obsession de ce gribouilleur qui, non content de se lancer des fleurs à tout bout de champ, s'étale sur ses frasques sexuelles comme un puceau racontant à ses petits copains sa dernière baise imaginaire.


Pour brouiller les pistes, Norman donne le nom de Stephen Rojack à son personnage librement inspiré de lui-même. Un soir, au cours d'une dispute conjugale, SR menace sa femme, une riche héritière, avant de l'étrangler et de chasser toute vie hors d'elle. Sentant vaguement qu'il a fait une bêtise, il se met à errer à travers les nombreuses pièces de son loft, finissant par entrer dans la chambre de sa bonniche qui était justement en train de s'adonner à une séance de doigtage.


Enfin, un peu d'action, se dit-on avant de découvrir que Mailer parle de la baise comme d'un sacerdoce dédié à sa pure et transcendante gloire, entremêlant ici et là, en plein coeur de l'action, des métaphores qu'il a sans doute récupérées des poèmes d'amour écrits au cours de son adolescence.


SR, profitant de son récent veuvage, interrompt la bonniche dans son agréable séance d'onanisme et, sûr de la puissance enchanteresse de son regard hollywoodien, vient lui planter sa bite tantôt dans l'anus, tantôt dans la chatte. Il est des indécisions existentielles des plus cruelles, et nous nous surprenons à bâiller sur ces entrefaites. de la chatte ou de l'anus, qui gagnera ? le résultat semble des plus incertains et souhaitant préserver le suspens, se retenant de lâcher sa semence au plus vite, ce qui serait une bonne chose de faite, Mailer se met à invoquer tantôt le Diable, tantôt Dieu – le Diable étant évidemment associé au fion, ce qui ne saurait surprendre les catéchumènes zélés. Craignant peut-être que cette allusion divine ne suffise pas, Mailer file la métaphore en invitant les animaux à entrer dans la danse :


« Voici donc comment je lui fis l'amour, une minute ici, une minute là, un voyage pour le Diable et un pour le Seigneur, comme un chien qui abandonne la meute pour capturer lui-même le renard ».


Et la traque n'en finit pas, SR jonglant du vagin à l'anus sans jamais ne faire fausse route une fois, récitant des Pater noster pour se donner de la contenance. Les animaux reviennent de temps à autre, sous des formes sans cesse changeantes, marquant une imagination délirante : « comme un chat pris entre deux fils je sautais de l'un à l'autre, un coup chaque fois, portant les dépouilles et les secrets de l'enfer au Seigneur, rapportant des messages de défaite du ventre désolé, puis je choisis -ah ! mais j'avais le temps de changer- je choisis son vagin. Ce n'était plus un cimetière, un entrepôt, non, plutôt une chapelle désormais, un endroit décent, modeste, aux parois confortables, à l'odeur verte ».


Bien sûr, ce SR se croit génial mais pendant ce temps, sa bonniche doit patienter sagement le temps qu'il termine de réciter ses chapelets – non contente de torcher les chiottes toute la journée, elle doit aussi se faire torcher l'intérieur du cul pendant ses heures de repos. Après dix pages de Diable et de Dieu, de chats, de loups et de renards, l'affaire se conclue et, tout en soupirant de soulagement, la bonniche déclare : « Mr. Rojack, […] je ne comprends pas pourquoi vous avez des ennuis avec votre femme. Vous êtes un véritable génie ». Espérait-elle une augmentation ? SR serait assez imbu de lui-même pour croire qu'un paiement en nature lui suffirait. Encore une bonniche qui n'a rien compris à la vie.


Quelque peu apaisé, SR retourne dans la piaule où git sa femme. Il se passe encore quelques petites affaires et la meuf finit écrasée sur le béton, sous la fenêtre de sa chambre, dix étages plus bas. Les inspecteurs arrivent pour l'interrogatoire. SR pense leur avoir retourné le cerveau, à défaut d'avoir pu les baiser eux aussi. Que de stress. Tout chamboulé, SR décide d'aller traîner sa nuit blanche dans un boui-boui musical où il retrouve sur scène une certaine Cherry qu'il devait déjà connaître au sens chrétien du terme, nous supposons. Et c'est reparti mon kiki. SR élimine du regard quatre jouvenceaux qui tournoyaient autour de la juteuse Cherry avant d'embarquer son butin pour lui faire la fête. Dieu a désormais disparu. Nous partons pour une promenade en forêt dans la brume :


« J'entrai en elle de nouveau, ce fut comme se plonger dans l'eau chaude un jour glacé d'hiver, et nos désirs s'étaient rejoints comme des yeux qui ne se quittent plus du regard, nos désirs enfin unis dans l'égalité commencèrent à laisser couler leurs larmes, à s'attendrir dans cette lumière qu'étouffe la volonté pour ne pas pleurer, fer contre fer jusqu'à vibrer dans un brouillard de rosée, être essuyés puis mouillés à nouveau. Je traversais une grotte aux étranges lumières, sombres, comme des lanternes de couleur qui auraient brûlé sous la mer, frémissant reflet de flèches ornées de pierreries, la cité de rêve qui m'était apparue pendant que Deborah agonisait contre mon bras serré, et une voix me demanda si bas que j'entendis à peine, une voix comme un murmure d'enfant apporté par le vent : « Veux-tu d'elle ? Veux-tu vraiment d'elle, veux-tu enfin savoir ce qu'est l'amour ? » »


C'est vrai, c'est une excellente question. Personnellement, je n'ai plus du tout envie de savoir. Après ça, le mec de Cherry se ramène dans la piaule. C'est un black, il doit en avoir une grosse. Pas de problème, SR le remet à sa place – c'est pas la taille qui compte. D'ailleurs, Cherry profite de cette nouvelle victoire pour lui glisser, au coin d'une oreille pendante d'infatuation : « Alors écoute, Stephen, je vais te le dire. Avec toi, c'est arrivé. J'ai eu un orgasme. Je n'y étais jamais arrivée. Console-toi avec ça ». Aaaah ! et moi j'ai eu un orgasme de la connerie de la bite ! Toutes les femmes racontent ça à leur mec pour les tenir par la main des couilles, c'est de bonne guerre.


Allez, moi je vais aller me faire littérairement sauter par Bukowski maintenant. Lui au moins c'est un bon coup.Tchao.
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