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Critique de michfred


Grand.
Grand  espaces, grands bois, grand Nord, grand froid.

Chiens.
Chiens de traîneaux, chiens de meute, chiens courants, chiens de tête, chiens de garde, chiens de chasse. 

Sang.
Hérédité,  filiation, legs, ADN. Féminité, menstruation. Chasse, prédateur, crime.  Scarification, estafilade, blessure, hémorragie. Vampire.  

Adolescence.
Désir, trouble,  identité, genre , sexe.

Sauvage,  c'est un peu tout cela. 

C'est un premier roman, et on se dépêche de lui trouver des parrains et des marraines , à cet enfant trouvé,  pour essayer de lui coller une étiquette rassurante. ...

Bien sûr,  Into the wild,   à  cause du titre -The Wild Inside  est le titre anglais de Sauvage-  , pour le" wild" incontestable du décor et des personnages. La ville est loin, la forêt dicte sa loi, et c'est la loi du sang.

Peut-être un zeste de  Dans la forêt?  mais dans Sauvage on est plus dans une sorte de fantastique poétique, métaphorique  et discret  que dans un roman post apocalypyique plus ou moins lourdingue. 

Une pointe de My absolute Darling , alors, pour l'adolescente en pleine déréliction? Tracy,  petite soeur nordique de Turtle, la californienne?  Sauf que le prédateur ici tarde à  montrer son visage..

Richard  Wagamese, donc,  à cause de la neige, de la forêt giboyeuse et des lacs gelés ?  Mais le musher a remplacé  le trappeur ou le hockeyeur. Et point de culture ni de légendes indiennes, juste le souvenir de Curwood, le chasseur de loups ou de grizzly.

Sauvage...avant tout,  un livre  inclassable.
Et bourré de qualités !

Formidablement écrit ,  grâce au pouvoir magique du sang, du sang "bu" -ah ce verbe "boire" employé absolument comme pour une grande addiction alcoolique !- qui permet mieux qu'une focalisation interne de "voir" et de "sentir" avec les yeux , la sensibilité d'un autre.

Il suffit de boire le sang et Je est un autre...Rimbaud n'est pas loin,  et ses Voyelles en couleurs!

Fascinant par les images qu'il fixe sur notre rétine.

Maman au bout de l'allée, immobile dans son manteau rouge qui vole au vent du soir.

Jesse , rat androgyne, discret, fureteur, l'oeil et l'oreille aux aguets, rompu à toutes les ruses, tous les mensonges.

Papa, sévère et tendre. Rassurant et naïf.  Papa si fort et si fragile.

Scott le casanier, petit garçon d'intérieur, tendre et solidaire qui dessine sa vie plus qu'il ne la vit. Scott l'imagier, le chasseur d'images.

Et Tracy, surtout - dite Trace-  comme ces traces qu'elle suit pour relever ses pièges. Trace-Hécate, Trace-chasseresse, Trace la louve, la trappeuse, la musher, la surineuse, Tracy-messer sans gants blancs. Tracy la Sauvage.

Et les chiens, les chiens partout, dans le chenil, la cour, le traîneau, le panier, le canapé,le lac..

Je ne vous raconterai pas Sauvage.

Je voulais juste vous le faire humer un peu, comme on flaire une piste fraîche et qu'on part au petit trot derrière son fumet encore accroché aux brins d'herbe, aux cailloux, aux branches basses, et qu'insensiblement on accélère,  avec le coeur qui bat plus vite, qu'on couche les oreilles et qu'on devient aveugle et sourd à tout ce qui n'est pas cette odeur, cette tension, cet appel impérieux.

Laissez-vous happer, envoûter, entraîner par ce premier roman coup de maître, puissamment original et dérangeant; laissez-vous imprégner par ce livre chaud  au goût  de fer, comme le sang.


Sauvage? Attention, chef d'oeuvre!
 
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