AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Milllie


1985 à Chicago, la vie semble sourire à Yale : en couple avec Charlie, il vit une relation stable tout en étant entouré d'une joyeuse bande de copains avec qui il profite de la vie dans le Boystown, le quartier gay de la ville. Et son travail semble enfin sur le point de décoller avec un mystérieux héritage que la grand tante d'une de ses amies veut léguer et qui pourrait bien revenir à la galerie qui l'emploie. Mais la menace du SIDA devient soudainement concrète avec la maladie puis la mort de Nico, un de ses meilleurs amis...

La grande force des Optimistes est de nous faire revivre la fin de la (courte) période d'insouciance du début des années 80 quand les gays qui commençaient tout juste à pouvoir vivre un peu plus librement sans se cacher furent soudain confrontés à une épidémie de SIDA qui allait tout décimer sur son passage et répandre maladie, mort et angoisse. L'atmosphère du Boystown, l'insouciance joyeuse de la petite bande qui gravite autour de Yale, la solidarité et l'amitié entre ces jeunes hommes et Fiona, la soeur de Nico, amitié qui souvent remplace des relations familiales devenues inexistantes quand les parents les ont reniés, et puis très vite la nostalgie, les regrets ou les remords avec les premiers morts et la certitude que cette époque est en train de finir, tout cela est parfaitement rendu par Rebecca Makkai et plonge le lecteur dans un abime d'émotions.

Ce récit alterne avec une seconde période, située de nos jours, centrée autour du personnage de Fiona, la "bonne copine", soeur de Nico, une des premières victimes de l'épidémie, qui alors qu'elle avait à peine la vingtaine a plus ou moins sacrifié sa vie pour aider son frère et ses amis gays, a vécu les maladies, les morts, l'angoisse de cette période où les mutuelles pouvaient refuser de prendre en charge les soins et où les hôpitaux ne savaient que faire face à ces jeunes malades victimes d'une maladie encore quasi inconnue. Même si on comprend vite la volonté de l'auteur de nous montrer aussi l'impact qu'a pu avoir cette maladie sur ceux qui ont survécu et à quel point elle a pu les empêcher de se construire ou de vivre leur vie, cette partie m'a semblé moins forte. L'intrigue secondaire autour de la recherche de la fille de Fiona, qui a quitté la maison, s'est enrôlée dans une secte et a coupé tout contact avec ses proches paraît bien ténue et on a du mal à s'intéresser à ces histoires de détective privé, de recherches sur Internet et de quête désespérée pour Fiona de reconstruire la famille qu'elle n'a pas vraiment su ou pu bâtir.

Plus que cette construction alambiquée et qui n'apporte pas grand chose (le récit mêle aussi une 3e intrigue autour d'oeuvres d'art et d'un amour lui aussi brisé mais par la première guerre mondiale) et surtout qui malheureusement entraine quelques longueurs pour le lecteur, je retiendrai de ce roman l'émotion que nous fait ressentir l'auteur, la construction par petites touches de personnages qu'on a l'impression de connaître depuis toujours et auxquels on ne peut que s'attacher. Magnifique Yale, si complexe, balloté par les événements et cherchant tout simplement à survivre, et surtout Fiona, jeune fille grandie trop vite, elle aussi emportée par la tourmente et qui sous des airs de fragilité se révélera le ciment et le soutien indéfectible de la bande. La reconstitution historique, très juste et minutieuse, est aussi parfaite et importante pour ne pas oublier à quel point cette épidémie fut totalement négligée à ses débuts aux Etats-Unis car finalement elle était vue comme une "punition" bien méritée par certains conservateurs ou religieux. Un beau roman qui aurait sans doute gagné à être plus condensé et resserré, les intrigues secondaires paraissant bien fades face au sujet principal.
Commenter  J’apprécie          220



Ont apprécié cette critique (21)voir plus




{* *}