En bonne amatrice de
Mathias Malzieu, je me suis laissé tenter par ce recueil poétique créé en collaboration avec sa chère et tendre, l'artiste plasticienne et photographe
Daria Nelson, la collection Iconopop, le photomontage décalé faisant penser aux Surréalistes, que l'on devine derrière le titre qui sonne un peu
Rimbaud et beaucoup
Vian, me faisant miroiter une expérience poétique pleine d'humour et de vie.
Par ces
poèmes et quelques intermèdes dialogués avec les fantômes de
Vian, de Gainsbourg et de Bashung lui rendant visite en rêve,
Mathias Malzieu essaime les différentes étapes de son histoire d'amour avec
Daria Nelson, dresse son portrait en insistant sur des détails, notamment anatomiques, qu'il affectionne particulièrement chez elle (rappelez-vous le « nichonnier » du « Plus petit baiser jamais recensé » ;-), laisse voir leur quotidien et bien sûr toute la palette de sentiments qu'elle lui fait éprouver.
On retrouve les images habituelles de l'auteur : la fée, la fée électrique / électricité ; des associations d'idées, jeux de mots et/ou de sonorités qui font sourire .« Perdre (la tête) en corps et en coeur », ou le poème « Générateur de poésie automatique » :
« Tu es un générateur de poésie automatique
quand ton français redevient russe par accident joyeux.
Alors, s'il te plaît…
Continue à faire du purée avec des anesthésiologues,
fée des erreurs de conjugation au passé compliqué
car ainsi tu simplifies mon futur inconditionnel. »
J'avoue avoir été un petit peu déçue par certaines expressions, formulations, images que j'ai pu trouver un peu faciles, trop triviales à mo goût, ou raides, pas naturelles (dans certains dialogues avec les fantômes surtout). Mais au fur et à mesure que je réfléchis pour rédiger cet avis, je me rends compte que ce qui me touche dans cette oeuvre, c'est ce que cela dit de ces deux êtres et de leur relation, comment cette femme a commencé à illuminer sa vie, est devenue sa partenaire, sa complice, mais également comment il découvre en elle un être humain fragile, avec ses failles et ses histoires – comme lui - ; ce qui implique qu'elle existe en dehors de lui et en dehors de leur relation, ce que je trouve libérateur en matière de poésie amoureuse au vu de mes références classiques assez enfermantes et réductrices pour les femmes... On sent bien l'approfondissement de leur relation et de son amour pour elle, pour sa personne.
Les photomontages créés par
Daria Nelson pour illustrer certains de ces
poèmes m'ont quelque peu heurtée au départ, y trouvant des références classiques, vieillottes et rétrogrades de femme-objet, de femme-muse - mais qui correspond effectivement au ressenti que j'ai eu sur les
poèmes illustrés en question. Et de fait, le dernier photomontage donne une image assez radicalement différente d'une femme comme un être à part entière, riche, puissant, indépendant, que l'amour soutient et épanouit, rend plus fort - effet traditionnellement souvent exprimé et magnifié par l'homme amoureux, et beaucoup par
Mathias Malzieu, qui s'applique donc ici à la femme amoureuse et aimée (c'est comme ça que je l'interprète, il y a certainement d'autres idées à voir) - c'est en concordance avec mes conclusions sur les textes.
Merci Babelio de me permettre de réfléchir en écrivant des critiques et ainsi de mieux comprendre les oeuvres lues, sans rester sur une première impression mitigée, intuitive et non réfléchie.