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Critique de piccolanina


Le couloir de ses souvenirs bat la campagne , puis se fige sur un moment bien précis de la vie de gamin de son père.
Des images cruelles et poignantes arrivent pêle-mêle puis se rangent dans son esprit chagrin , où seule la poésie peut lui tenir compagnie , et , l'aider à nous raconter .

Comme chacun porte en soi des ombres et des cicatrices qu'il désire celer au plus profond de son coeur , l'auteur a voulu honorer son père sans en décrire trop , en ce mois de juin 44 , quand il traverse , camouflé , la ligne de démarcation , qui fut supprimée en mars 43 mais dont 14 points de contrôle subsistèrent , surtout pour filtrer le passage des juifs .

" Voilà le plan : quitter la zone libre pour aller se jeter dans la gueule du loup , en zone occupée , se faufiler entre les dents dudit loup et rester planqué dans son ventre avec Grand-mère ; ensuite attendre que quelqu'un tue la bête . " P. 20

Son imagination débordante utilise la fameuse ferme aux objets immuables qui retracent les habitudes de ses aïeux , gratinées d'anecdotes .
Il les connaît , bien sûr , comme gosse d'après-guerre , sans les traumatismes subis par les siens .

Il creuse très fort dans les méandres de sa mémoire pour nous émouvoir par une lettre que son papa , surnommé Mainou , rédige régulièrement , à propos de tout et de rien dans sa planque familiale . Il parle à sa maman , morte en couche avec sa soeur Mireille , quelques jours avant son séjour chez les Lorrains .

Pour être crédible , il s'offre la magie : allier réel et irréel et cela marche , car il sait qu'il faut vivre une situation avec tous ses sens en éveil pour en éprouver la réceptivité .

Je me souviens d'ailleurs d'une phrase impitoyable et dure que prononçait ma mère , sèchement , quand l'une de ses filles était en défaut . " Regarde-moi dans les yeux quand je te parle " . Elle nous hypnotisait avec ce regard bleu comme la mer .
Ses mots nous suivent encore aujourd'hui ; le meilleur ou le pire des dialogues est un éclair de lumières qui s'échange dans un face à face .
Sévère mais tendre sans jamais une seule claque !
Vous pouvez visionner la scène mais pas ressentir notre émotion !

Avec beaucoup d'adresse , L'auteur place des phrases solidaires et surtout efficaces dans l'envie de nous persuader qu'un enfant écrit aussi bien .
Ne sous-estimons pas la jeunesse qui peut nous épater par sa maestria , je l'ai redécouvert récemment .

" Quand le jour se lève , je suis encore en train de t'écrire ce que m'a confié l'Emile . J'ai piqué le dictionnaire de Grand-mère pour mettre des mots et des expressions qui ressemblent à quand il parle ." P.91

Un mélange de paroles enfantines et adultes crée un trouble , une confusion mais aussi un émerveillement .
Autant j'ai yoyoté au début de ce roman malgré l'histoire émouvante , autant j'aurais voulu retrouver cette poésie .

Matthias Malzieu , comme Maryna Uzun , ont un pouvoir , celui d'assembler les émotions dans un ballotin de moelleuses pralines , parfumées de quelques gouttes de féérique adrénaline , où l'amour et la fraternité se transportent de pays en pays , mélodieux et colorés en mignardises pour nos regards !




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