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Critique de Scribe


Ce que tient ta main droite t'appartient de Pascal Manoukian
Contrairement à mes habitudes avant de vous parler de ce livre qui vous remuera les sens, c'est du moins ce que j'ai ressenti, je me suis attardé sur la personnalité de son auteur Pascal Manoukian. Pascal Manoukian, né en 1955 est un ancien reporter de guerre et cela prend sens à l'écriture de ce livre, qui a couvert entre 1975 et 1995 tous les théâtres des grands conflits du Liban à l'Irak. Qui en 1979 est pratiquement le seul photographe occidental présent au moment de l'entrée des troupes soviétiques en Afghanistan. Qui en 2013 a dirigé l'agence Capa. A la lecture de ce parcours, j'ai mieux compris l'âpreté de ce livre Ce que tient ta main droite t'appartient. « Si ce soir-là, Charlotte n'était pas sortie dîner entre filles, si Karim son futur mari Algérien, musulman croyant en un Islam de paix et de partage n'était pas allé à la mosquée, jamais elle n'aurait déchiré sa robe, jamais il ne serait parti en Syrie. Chaque jour ils seraient plus amoureux, boiraient du Sancerre au bonheur de leur 30 ans et danseraient sur Christine and the Queens. » Mais avec des si, ne mettrions-nous pas Paris en bouteille ! Dans les premières chapitres Pascal Manoukian, nous présente la famille de ces deux jeunes gens, leur façon de vivre, la façon qu'ils ont de pratiquer leur religion et la quiétude de leur foyer qui va accueillir un enfant, Charlotte étant enceinte. Mais au fil des pages que l'on tourne l'on sent poindre une tension, que vous ressentirez sans aucun doute. La crainte que leur vie à Charlotte et Karim soit trop belle, trop tranquille, loin des bruits de la ville. Cette tension je l'ai ressenti physiquement et j'avouerai c'est bien la première fois que je me suis senti oppressé. Ce rendez-vous avec des copines, toutes heureuses de se retrouver et de fêter le ventre rond de Charlotte, va être interrompu par la venue d'un ancien camarade de Karim, Aurélien un français de souche fréquentant une mosquée Salafiste. Celui ce soir-là après avoir quitté sa mère dans leur HLM de banlieue, après s'être maquillé, l'on pouvait penser qu'il se rendait à une soirée, retrouve un autre camarade à lui qui lui demande : s'il a bien pris son cachet et lui en redonne un autre, l'informant « Mon frère tu vas bander toute la soirée ».En fait il va se retrouver avec une arme automatique dans les mains, mitraillant avec son comparse, les personnes se tenant en terrasse et dans l'établissement le Zébu Blanc avant de déclencher leur ceinture d'explosif préparée avec des clous, des boulons et autres objets métalliques pour faire le plus de victime possible. A partir de cet instant nous entrons dans la deuxième partie de ce livre. Karim, veut comprendre le chemin de la radicalisation d'Aurélien et décide de partir en Syrie venger Charlotte. Pour cela sous un faux nom via Facebook il s'inscrit. Rapidement au regard de son profil il est contacté par un recruteur de Daesh intéressé par son profil. Son parcours va d'abord le conduire en Belgique, dans le quartier que nous connaissons tous par l'actualité récente, celui de Molenbeek. Là, il va rencontrer Lila qui a 15 ans, en rupture familiale, qui rejoint son mari épousé sur internet est vivre dans le paradis vanté ou tout est à profusion. Anthony qui pense donner un monde meilleur à sa famille composée de Sarah et de leur enfant Adam âgé de 4 ans. Leur périple ne sera pas de tout repos. Les règles des recruteurs, puis des passeurs doivent être suivies à la lettre, tout manquement étant sanctionné. Vous découvrirez comment l'on passe aisément moyennant son passage de la Turquie à la Syrie. le voyage idyllique, le paradis promis, va vite se transformer en cauchemar en approchant la ligne de front bombardé et en rejoignant via des immeubles éventrées un contact qui les conduiront dans un camp ou femme et homme vont apprendre à tuer avant d'être volontaire pour des actions terroristes notamment en France. « Au septième jour, plus un homme n'est debout, aucune volonté n'a résisté, on leur a trépané la mémoire, les instructeurs n'ont plus qu'à y plonger les doigts pour les reprogrammer. »

Daesh via les réseaux communique constamment. Karim ayant travaillé en montage pour des reportages télévisés, va devenir responsable du montage de films réalisés lors de massacre de population Yézidie berceau de l'humanité. ou les jeunes filles deviennent des esclaves sexuelles, mises à disposition de leur maitre avant d'être exécutées lorsque celui aura une autre jeune fille non pubère à sa disposition. « Aucun esprit sain n'était capable d'imaginer l'horreur qui se dégageait des cheminées des camps. C'est le propre des bourreaux d'inventer des douleurs qui dépassent l'imagination. Ils peuvent ainsi assassiner les mains libres. » Des passages inimaginables vont être ainsi mis en ligne, pour attirer d'autres individus. « Daech précise un responsable en Syrie à Karim, trouve sa force dans nos faiblesses, dans notre démocratie, dans les carences de notre société. « La force des barbares est d'utiliser les faiblesses de ceux qu'ils combattent. Il a suffi à Daech d'ouvrir Télé Z pour découvrir les nôtres. » le recrutement tourne à plein régime via les réseaux sociaux attirant les laissées pour compte, les plus crédules, les moins cultivés et les désespérés. Daech ne compte pas ses morts aussitôt remplacés par des nouveaux volontaires venant de tous les pays du monde. Karim s'investit dans son travail pour un seul but, celui de rencontrer le chef qui a endoctriné Aurélien et de le tuer pour venger Charlotte. Karim y parviendra-t-il ? C'est dans ce voyage réaliste de l'embrigadement à toutes les violences que je vous invite à lire le livre de Pascal Manoukian Ce que tient ta main droite t'appartient. Un livre à mes yeux indispensable qui va vous conduire à vous interroger. Un livre dont le style percutant vous fera froid dans le dos. Un livre qui je le sais hantera vos nuits, dont on ne sort pas indemne. Mais un livre, juste, efficace, mettant en lumière des monstres, mais aussi des centaines d'égarer qui ont fait le mauvais choix, pour de mauvaises raisons. Bien à vous.
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