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A l?occasion des fêtes de fin d'année, on vous propose de revisiter 2018 à travers les coups de c?ur de l'équipe, mais aussi de vous donner des idées de livres à offrir à Noël à travers la sélection beaux-livres d'une libraire. Découvrez aussi notre Top des livres les plus populaires en 2018 sur Babelio, ainsi qu'un avant-goût de la rentrée littéraire de janvier 2019. L'occasion de finir l'année en beauté !s en octobre 2018.
0:19 Reportage à la librairie Ici de Grands Boulevards à Paris. Elodie nous présente sa sélection de beaux-livres
Informations et horaires d'ouverture : https://www.icigrandsboulevards.fr/
Les livres présentés :
Charlotte Vannier, 'De fil en aiguille' : https://www.babelio.com/livres/Vannier-De-fil-en-aiguille/1102796
All about Saul Leiter : https://www.babelio.com/livres/Leiter-All-About-Saul-Leiter/1102797
Paul Cox, 'Design & Art' : https://www.babelio.com/livres/Cox-Design-Art/1102799
3:27 Les livres les plus populaires de 2018, le top annuel des Babelionautes : https://babelio.wordpress.com/2018/12/06/ou-lon-vous-presente-les-18-livres-les-plus-populaires-de-lannee-2018/
Notre entretien avec Adeline Dieudonné : https://www.babelio.com/auteur/Adeline-Dieudonne/84191#itw
4:54 Rentrée littéraire de janvier 2019
Les livres conseillés par Elodie de la librairie Ici :
Franck Bouysse, 'Né d'aucune femme' : https://www.babelio.com/livres/Bouysse-Ne-daucune-femme/1097309
Joseph Ponthus, 'A la ligne' : https://www.babelio.com/livres/Ponthus--la-ligne--Feuillets-dusine/1099039
8:15 Les coups de c?ur de l'équipe
Pascal Manoukian, 'Le Paradoxe d'Anderson' (Charlotte) : https://www.babelio.com/livres/Manoukian-Le-paradoxe-dAnderson/1050640
Philippe Vasset, 'Une vie en l'air' (Guillaume) : https://www.babelio.com/livres/Vasset-Une-vie-en-lair/1055621
Clémentine Beauvais, 'Brexit Romance' (Nathan) : https://www.babelio.com/livres/Beauvais-Brexit-romance/1050812
Jean Hegland, 'Dans la forêt' (Octavia) : https://www.babelio.com/livres/Hegland-Dans-la-foret/888010
Richard Thaler, 'Misbehaving' (Pierre F) : https://www.babelio.com/livres/Thaler-Misbehaving--Les-decouvertes-de-leconomie-compor/1049085
Jon Kalman Stefansson, 'Asta' (Pierre K) : https://www.babelio.com/auteur/Jon-Kalman-Stefnsson/118462
Brecht Evens, 'Les Rigoles' (Mathilde) : https://www.babelio.com/livres/Evens-Les-rigoles/1055635
Jean Lopez (dir.), 'Infographie de la Seconde Guerre mondiale' (Nicolas) : https://www.babelio.com/livres/Lopez-Infographie-de-la-Seconde-Guerre-mondiale/1079231
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Autour d'Essaimcourt, aucun village n'a résisté. Une seconde Occupation, sans chars ni Gestapo. Les mêmes qui avaient combattu se sont rendus, ont capitulé, ont levé les bras. Les drapeaux bleu-blanc-rouge déployés à l'époque de Léon pour affirmer la résistance au néant le sont aujourd'hui pour symboliser son acceptation. C'est une reddition. Cette fois, l'ennemi vient de l'intérieur. Les slogans de haine endeuillent les murs des usines, souhaitent la mort d'Arabes là où on n'en croise aucun. Chaque voyage en car scolaire désespère Léa. Elle regarde défiler cette France recroquevillée où les frontistes, comme des dealers, refilent leurs saloperies et leurs idées mortifères. Les villages comptent de plus en plus d'accros. Les permanences du parti sont autant de salles de shoot, où à l'abri des murs et des slogans on autorise ce qui est interdit : la haine de l'autre, le racisme, le négationnisme. Le plus noir de l'homme est repeint en bleu marine, un camouflage grossier. On n'est plus facho mais patriote, plus raciste mais pour la préférence nationale, plus antisémite mais contre les forces de l'argent. Le père a fait sa fortune en détournant l'héritage d'un cimentier, sa fille s'en sert pour dresser des murs. Chaque village conquis s'isole du reste du monde, s'entoure de remparts comme au Moyen Âge. Ils sont déjà des centaines à avoir choisi cet enfermement volontaire. Léa, elle, ne rêve que d'enjamber des ponts.
Pages 21-22, Seuil, 2018.
Moi, tu sais quoi ?... Je ne rêve plus. Ils ont même fini par m'enlever ça. À quoi tu veux rêver à 37 ans avec 1200 euros par mois ! Aux vacances ? Je ne dépasse jamais les putains de galets de Dieppe. À une maison ? Mon banquier m'a fait comprendre que j'avais plus de chances de choper Shakira qu'un crédit immobilier. Alors qu'est-ce qui me reste ? La baise ? Mais en faisant attention, alors, parce que j'ai déjà deux gosses. La picole ? Mais en faisant encore plus gaffe, parce que si je perds mon permis je perds mon boulot.
Page 217, Seuil, 2018.

Il y a peu de temps encore on se disputait sa compagnie. Elle encombrait ses journées de rendez-vous inutiles, d'apéros, de déjeuners du week-end, de mèches chez le coiffeur, de sorties ciné/ pizza quatre-fromages entre copines au multiplexe de la zone industrielle. Son téléphone sonnait, on comptait sur elle, on lui faisait promettre « à demain » ou « à très vite », elle embrassait, lançait des « ciao » avec la main, textotait des « merci » et des « je t'aime ». Depuis, comme un cyclone, le chômage a déforesté sa vie, plus un de ses arbres ne tient debout, on dirait les montagnes pelées d'Haïti, rien pour arrêter l'érosion, personne, un Sahel affectif. Elle ne parle plus qu'à des guichets et des hygiaphones, n'appelle plus que des numéros à quatre chiffres, surtout le 3949, ne s'adresse plus qu'à des répondeurs et à des voix numériques, articulant lentement son identifiant à sept chiffres et ses mots de passe, punie, bannie, coupable simplement d'avoir la quarantaine juste à la pliure entre l'économie d'hier et celle de demain. Elle se demande ce que vont devenir tous ceux qui travaillent avec leurs mains. Où vont disparaître leurs gestes, dans quels musées ? Les terrils et les mines sont déjà classés au Patrimoine de l'Unesco. Quel avenir pour toutes ces usines mortes ? Des cars scolaires y emmèneront peutêtre les enfants pour observer des ouvriers faisant semblant de travailler en tournant en rond autour de machines débranchées comme les singes des zoos font semblant de vivre libres.
Pages 221-222, Seuil, 2018.
— J'ai vu un reportage sur une usine de jeans à Dacca, raconte-t-elle, la journaliste y faisait le portrait croisé d'une ouvrière française et d'une jeune Bangladaise. L'une avait perdu son travail, l'autre l'avait récupéré. L'une touchait des indemnités pour oublier les gestes, l'autre s'esquintait le dos à les répéter, toujours les mêmes, pour presque rien. L'une se sentait inutile, l'autre utilisée. Fallait voir le gâchis... se désole-t-elle.
Aucune ne gagnait de quoi faire vivre sa famille. Ça n'avait produit que du malheur.
— Et tu sais quoi ? lui demande Cindy. Le plus dégueulasse, c'est que malgré toute cette casse, en cinquante ans de tour du monde dans les usines les plus pourries, le prix du jean n'a jamais baissé ! Tu continues à le payer aussi cher que tes parents ! La seule différence, c'est qu'aujourd'hui tu tires la langue pour t'en offrir un.
Pages 52-53, Seuil, 2018.

À sa décharge, tente-t-il de se convaincre, les ouvriers se dressent rarement contre le système. Même avec de l'eau jusqu'au cou ils espèrent encore, il faut attendre que le niveau de désespoir atteigne les mocassins des couches supérieures pour voir se dresser les barricades. Aujourd'hui la France y est presque. Une grande partie des infirmières, des professeurs, des artisans, des médecins a déjà les pieds dans l'eau. Plus personne ne se sent au sec. Chacun tremble de devoir renoncer à sa manière de vivre, d'être obligé de sacrifier la scolarité d'un enfant sur deux, de ne plus pouvoir s'occuper dignement de ses parents. La marée monte, inexorablement, inondant les classes moyennes. Les familles réclament désespérément les secours. Elles espèrent des bouées et on leur jette des modes d'emploi pour s'en fabriquer. Chacun doit devenir son propre sauveteur, s'auto-employer, chercher son salut dans l'économie de partage, louer sa voiture, sa perceuse ou son appartement, se « blablacariser s'« ubériser», se « crowdfundiser» pour pallier la frilosité des patrons et des banques, et, ultime abandon, accepter d'être licencié plus facilement pour espérer être embauché.
Pages 213-214, Seuil, 2018
Personne ne comprend rien aux ouvriers sauf les ouvriers eux-mêmes. Les usines font peur comme les cités. On n'y voit que la crasse, la cadence des chaînes, on n'en retient que le vacarme des machines, le claquement des pointeuses, la fumée de pneus qui brûlent, la violence des piquets de grève et les larmes des licenciés. Pourtant, chaque matin Aline y retrouve ses petits bonheurs, le travail bien fait d'abord et le travail tout court surtout, le café à la cantine, l'art du geste précis et maîtrisé, la complicité de classe et cette énergie qui, malgré la fatigue et les douleurs, court les ateliers.
Page 47, Seuil, 2018.
Aline vient de comprendre la mondialisation : c'est lorsque son travail disparaît dans un pays dont on ne connaît rien. Il n'y a pas mieux aujourd'hui pour enseigner la géographie aux enfants que de leur apprendre où sont passées les usines de leurs parents, se dit-elle.
Page 52, Seuil, 2018.
En une décennie de casse industrielle, de délocalisations, de plans sociaux, la corpulence moyenne des ouvriers du canton touchés par les fermetures d'usines a quadruplé. La faute en partie aux produits bas de gamme et aux mauvais sodas dont les grandes surfaces remplissent leurs rayons pour essayer, au fur et à mesure que la mondialisation en fabrique, de garder les pauvres comme clients. Trop d'acides gras, de E210, de E215, de graisses saturées, d'additifs chimiques, d'exhausteurs de goût, destinés à augmenter l'accoutumance aux marques les moins chères et les plus caloriques. Pour les Hyper et les Super, peu importent le cholestérol et la glycémie pourvu qu'il y ait l'ivresse d'un flux continu de Caddie aux caisses. Tout est bon à prendre : salaires, indemnités, allocations de fin de droits, minimum vieillesse, tickets restaurant.
Pages 80-81, Seuil, 2018.
« Apprenez à vos enfants ce que nous apprenons à nos enfants, que la terre est notre mère. Tout ce qui arrive à la terre arrive aux fils de la terre. Lorsque les hommes crachent sur la terre, ils crachent sur eux-mêmes. Nous le savons : la terre n'appartient pas à l’homme, c'est l’homme qui appartient à la terre. Nous le savons : toutes choses sont liées comme par le sang qui unit une même famille. L’homme n'a pas tissé la toile de la vie. Il n'est qu'un fil de tissu. Tout ce qu'il fait à la toile, il le fait à lui-même. »
Lettre du chef Seattle au gouvernement américain.
« Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal mais par ceux qui les regardent sans rien faire. »
Albert Einstein.
Épigraphes du roman.
Anderson a défini que l'acquisition par un étudiant d'un diplôme supérieur à celui de ses parents ne lui assurait pas nécessairement une position supérieure dans la vie professionnelle.Par exemple,imagine que moi,après trois ans de fac ou cinq ans d'école de commerce,je finisse caissière chez Simply.Ca,c'est le paradoxe d'Anderson.