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Critique de jvermeer


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« Boule de Suif » est le chef-d'oeuvre incontestable de Guy de Maupassant !
Un régal de lecture que j'ai relu sur Litteratureaudio.com, aspiré par le charme vocal de la très regrettée Victoria.
Cette nouvelle fut écrite à l'initiative d'Émile Zola proposant à de jeunes écrivains de publier un recueil collectif de nouvelles « Les soirées de Médan » rassemblant des histoires de naturalistes français. Il sera publié en 1880. Auparavant, en 1879, Maupassant en fera une lecture publique à ses amis.

Dans l'hiver 1870, en plein repli de l'armée française et l'envahissement de la ville de Rouen par l'armée prussienne, une diligence tirée par 6 chevaux emmène des négociants fortunés qui veulent rejoindre Dieppe. Ils sont dix, entassés dans la voiture : un couple de marchands de vin, un propriétaire de filatures, officier de la Légion d'honneur et sa très jeune femme, un couple d'aristocrates très riches, deux bonnes soeurs marmottant des prières, un démocrate désirant se rendre au Havre.
La dernière passagère, seule, est une de ces femmes que l'on nomme galantes, « petite, ronde de partout, grasse à lard, avec des doigts bouffis… appétissante et courue, tant sa fraîcheur faisait plaisir à voir ». Son embonpoint lui avait valu le surnom de Boule de suif.

Des chuchotements, les mots de « prostituée », « honte publique », courent parmi les honnêtes femmes en apercevant Boule de suif. Les conversations alimentent tout le voyage. La faim tenaillant les passagers, un geste attire tous les regards : Boule de suif sort tranquillement un panier de victuailles et commence à manger. « Mon Dieu, si j'osais offrir à ces messieurs et à ces dames... », dit Boule de suif voyant les regards affamés. « Nous acceptons avec reconnaissance, madame ». Ils se mettent à manger avec appétit. Certains parlent même de « charmante compagne ».

La nuit venant, la voiture s'arrête dans une auberge occupée par des Prussiens. Un officier allemand les invite à sortir : « foulez-fous tescendre, messieurs et tames ? ». On allait se mettre à table lorsque le patron de l'auberge arrive et dit que l'officier prussien désire voir mademoiselle Élisabeth Rousset. Il s'agissait du nom de Boule de suif. « Oh la canaille ! la canaille ! » dit-elle en revenant rapidement, rouge, furieuse. Tout le monde se couche.
Le lendemain, les voyageurs apprennent que l'officier, inflexible, a donné l'ordre de ne pas atteler pour continuer le voyage. Il demande à nouveau mademoiselle Élisabeth Rousset. Les voyageurs ne comprenant pas, Boule de suif est obligée, exaspérée, de leur parler : « Ce qu'il veut ?... ce qu'il veut ?... Il veut coucher avec moi ! » crie-t-elle. Une nouvelle journée passe dans le désoeuvrement, et tous les voyageurs retournent se coucher.

Plusieurs jours passent, sans départ. L'aigreur monte envers Boule de suif. La femme du marchand de vin éclate : « Nous n'allons pourtant pas mourir de vieillesse ici. Puisque c'est son métier, à cette gueuse, de faire ça avec tous les hommes, je trouve qu'elle n'a pas le droit de refuser l'un plutôt que l'autre. » Égrillardes, certaines des femmes finissent par plaisanter, avec un petit frisson : « Il n'avait qu'à dire : « Je veux », et il pouvait nous prendre de force avec ses soldats. ». Les yeux brillaient. On lançait des blagues grivoises. le comte décide enfin de s'occuper de l'affaire. Insistant, il appelle Boule de suif « ma chère enfant ». Elle leur rendrait service… Puis en la tutoyant gaiement : « Et tu sais, ma chère, il pourrait se vanter d'avoir goûté d'une jolie fille comme il n'en trouvera pas beaucoup dans son pays. »

Boule de suif disparait. « Ça y est », pense-t-on. Une gaieté de soulagement s'installe. « Et l'on ne dormit que très tard, assurément, car des filets de lumière glissèrent longtemps sous les portes. le champagne a de ces effets-là ; il trouble, dit-on, le sommeil. »

Le lendemain, Boule de suif reparait, honteuse, et la voiture repart. Les passagers l'évitent. « Heureusement que je ne suis pas à côté d'elle. », dit la femme du marchand de vin. Affamés, ils sortent des provisions, rien pour Boule de suif. le mépris des occupants l'accable et elle se met à pleurer dans l'indifférence générale. Madame Loiseau a un rire muet de triomphe et murmure : « Elle pleure sa honte. »


« Un chef-d'oeuvre de composition, de comique et d'observation », disait Flaubert sur « Boule de suif ». Comment ne pas approuver le respect admiratif du maître envers son élève.
Ce récit est un texte politique et subversif, souvent hilarant. Impossible de ne pas ressentir le sentiment de profonde humanité recherché par l'auteur envers cette pauvre femme que l'hypocrisie, la bêtise d'une société bourgeoise, aristocrate et religieuse, engoncée dans ses certitudes sur la morale, rejette socialement.

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