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Critique de BazaR


BazaR
15 novembre 2018
Formidable premier contact avec Guy de Maupassant.

Je ne suis pas un grand fan des récits ayant pour thème la folie. Je crois que cela est lié à mon esprit profondément rationnel qui déteste manque de prises sur laquelle la raison puisse s'appuyer. C'est aussi probablement un écho d'une peur profonde d'un univers qui serait incontrôlable, non-analysable, chaotique. La raison et sa fille la science donnent une impression de maîtrise très rassurante de son environnement ; dans un univers que l'on peut comprendre et même prédire, on se sent plus en sécurité. Mais la folie ?

Eh bien sans le vouloir, je viens dans le paragraphe précédent de plagier le Maupassant du Horla (avec beaucoup moins de talent).
Nous avons un homme qui est le produit de sa civilisation issue des Lumières, qui aime que son cosmos fasse sens, et qui d'un coup se retrouve face à des phénomènes inexplicables dans sa maison et dans son propre corps, dans sa propre âme. La terreur l'envahit – la même que celle qui me prend à l'idée d'un univers qui rirait de la raison – et pourtant il l'approche avec une impeccable rationalité. Il cherche l'explication dans l'hypnose et le « magnétisme » tel que présentés par Mesmer. Il effectue des expériences avec ses bouteilles d'eau bues dans la nuit. Il pose des hypothèses et en déduit une stratégie de défense.
Le journal qu'il écrit montre un style remarquable (celui de Maupassant) qui n'évoque certainement pas la folie furieuse. Pourtant, ses phrases analytiques évoquent la terreur, la folie, la perte du sommeil, et l'existence d'être venus d'ailleurs dans l'univers pour lesquels nous ne serions que des scarabées. Lovecraft a-t-il lu Maupassant ?
Cet homme est-il fou ? Peut-être, mais d'une folie qui permet l'accès à la raison tout en l'emprisonnant dans un monde qui n'existe peut-être que dans son esprit. Ça me rappelle Shutter Island.
Le style littéraire de cette nouvelle est délicieux. C'est donc cela, lire Maupassant ? En dehors du thème principal, on se régale à lire ses regards en biais sur son époque et son amour de la nature proche de celui des Impressionnistes. J'ai appris que Guy de Maupassant avait écrit le Horla à une époque où lui-même était sous la coupe de stupéfiants. Il a visiblement réussi à faire émerger de son état une remarquable créativité.

Le recueil que j'ai lu contient quatre autres nouvelles fantastiques plus anciennes qui mettent chacune en avant un aspect de ce qui sera beaucoup plus élaboré dans le Horla. « Un Fou ? » décrit un homme doué de talents de magnétisme, « Lettre d'un Fou » l'effroi de savoir qu'une force indicible est présente dans sa maison. « Une Folle » et « La peur » s'éloignent un peu du sujet. Quoique de style agréable, aucune de ces nouvelles ne vaut devant le Horla.

Bon, à présent que j'y ai goûté, je reviendrai vers Maupassant. Cela au moins n'est pas une folie.
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