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Critique de Warrenbismuth


Ce livre n'est pas à confondre avec la nouvelle éponyme écrite auparavant. Ici il s'agit bien d'un récit de voyage de 1888, ou plutôt d'un recueil de chroniques de divers voyages maritimes effectués par MAUPASSANT entre 1881 et 1887, près de Cannes, Antibes, Saint Tropez, dans cette région alors fraîchement appelée Côte d'Azur (en 1887 justement !).

Ne vous attendez pas à un récit maritime au long cours dans ce recueil, mais bien plutôt de réflexions sur les abords de la Méditerranée. Comme tout bon écrivain, de surcroît doté d'un certain talent, MAUPASSANT, fin observateur, prend des notes qu'il rédige ensuite. Sa « croisière » n'en est pas tout à fait une malgré la volonté de l'auteur d'y présenter une suite logique. Ces brefs voyages ne se sont pas effectués en une fois, ni même sur un temps court.

Ce qui frappe dans ce livre, c'est cet éloge de la solitude, que MAUPASSANT recherchait contre vents et marées, et paradoxalement un étouffement par la foule dès qu'il pose le pied à terre. Car ce recueil n'est pas fait d'un bloc : si l'auteur aime à décrire ce qu'il voit en mer à la façon d'un peintre impressionniste, il digresse longuement sur des idées, des réflexions captées sur la terre ferme. Il semble fatigué de l'humain et n'hésite pas à égratigner ses semblables, notamment ceux de la bourgeoisie ou de l'aristocratie, ou encore les courtisans, pullulant en ces lieux (voir aussi quelques pages d'anthologie dans « Les dimanches d'un bourgeois de Paris »). Bien que la Côte d'Azur ne soit pas encore le vacarme touristique qu'elle deviendra, on y trouve déjà l'aisance dans la représentation de classe. de passage à Cannes, il note « Et je pensais que dans toutes ces villas, dans tous ces hôtels, des gens, ce soir, se sont réunis, comme ils ont fait hier, comme ils le feront demain et qu'ils causent. Ils causent ! de quoi ? des princes ! du temps !... Et puis ?... du temps !... des princes !... et puis ?... de rien ! ».

C'est un MAUPSSASANT plutôt misanthrope qui s'exprime en ces pages, mais apaisé alors qu'il retrouve la mer sur son yacht le « Bel-Ami » ou même sur une simple barque. Il nous entretient de la pêche, des paysages qu'il aperçoit au loin, mais sait se faire virulent, non seulement pour l'espèce humaine, mais pour ce qu'elle produit, la littérature notamment, qui n'est à ses yeux qu'hypocrisie. Puis il se fait contemplatif, mais toujours saignant : « Et partout, le long de ce rivage démesuré, les villes au bord de l'eau, les villages accrochés plus haut au flanc des monts, les innombrables villas semées dans la verdure ont l'air d'oeufs blancs pondus sur les sables, pondus sur les rocs, pondus dans les forêts de pins par des oiseaux monstrueux venus pendant la nuit du pays des neiges qu'on aperçoit là-haut ».

Et puis le calme revient. MAUPASSANT s'ébahit devant la lune, confie des éléments géographiques, enrichit sa trame de faits divers, notamment celui de l'encombrant cadavre du musicien italien Niccolò PAGANINI, mort à Nice, mais aussi de l'évasion du général BAZAINE du Fort royal de l'île Sainte-Marguerite, tout près de Cannes en 1874. de passage à Monaco, il se remémore ce fait divers d'un homme condamné à mort par la justice, mais ne pouvant être exécuté en l'absence de guillotine sur le territoire monégasque. D'ailleurs, MAUPASSANT écrit sur les prisons, mais aussi sur le prolétariat ou la dangerosité de la routine et fait part de certains incidents de ses voyages.

Piètre poète, MAUPASSANT réussit pourtant dans ce récit à poétiser les paysages en de fines allégories, il nous embarque à bord de son yacht pour mieux nous faire sentir les embruns. Ce livre est tout d'abord sorti en 1888, MAUPASSANT traversait déjà des crises de semi démence ajoutées à des accès de mélancolie profonde, nous retrouvons cet état de fait dans certaines des chroniques ici présentes. Il a rédigé d'autres récits de voyages, comme « Au soleil » ou « La vie errante », et il n'est pas du tout impossible que je revienne vous en causer d'un pied alerte et marin dans les prochains mois.

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