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Critique de bgbg


bgbg
30 novembre 2013
Le grand passage, par Cormac MacCarthy. Après "De si jolis chevaux" qui contait déjà l'épopée mexicaine tourmentée de deux jeunes gens, la trilogie des confins se poursuit avec "Le grand passage", livre tout aussi puissant, et qui reprend les thématiques du premier : des adolescents sans avenir et en quête d'ailleurs, les grands espaces, déserts, montagnes, passages accidentés, la confrontation de jeunes américains avec la vie mexicaine, à la fois pauvre, rude et violente, et chaleureuse, humaine. La solitude est aussi un thème récurrent. Quoi qu'il en soit, les règles ne sont pas les mêmes de part et d'autre de la frontière des Etats-Unis avec le Mexique. Là, les hommes, voleurs de chevaux, brigands de grands chemins ou employés de latifundiaires, s'accomplissent dans la violence et la vengeance et ne supportent pas l'atteinte à leur honneur. Nos deux américains, Billy et son jeune frère Boyd, affrontent avec une certaine naïveté, mais aussi de l'audace et du courage, la nature qui peut être très hostile, le dénuement et la faim qui sont leur condition habituelle, et les hommes dont la sauvagerie s'exprime à tout bout de champ. Ils font aussi des rencontres de haute spiritualité où s'expriment des conceptions parfois alambiquées de la vie, de la mort ou de la religion. Ces sages sont un connaisseur en loups, un vieil ermite, un gitan, un révolutionnaire, etc.
La barbarie humaine, omniprésente, prend une forme particulièrement tragique quand, au cours d'une fête de village, les hommes s'en prennent à une louve gravide que Billy avait capturée et qu'il voulait ramener et relâcher dans son Mexique natal ; sur une scène, devant une foule déchaînée, ils lâchent leurs chiens sur la louve enchaînée, chacun à leur tour. le premier voyage de Billy s'achève ainsi sur un revers, qui sera doublé, à son retour chez lui par un drame qui a décimé sa famille.
Il lui reste à repartir avec son jeune frère sur les terres mexicaines, à la recherche des chevaux volés à ses parents. Il reviendra sans son frère et sans les chevaux, après avoir vécu des chocs de toutes sortes, de la violence, des rencontres pleines d'humanité, encore de la violence … Il y retournera une troisième fois à la recherche de son frère, qui avait "fugué" avec une petite mexicaine.
Ce livre sombre, désespéré, est beau, ensorcelant et rayonnant à la fois. Envoûtant, extrême, il prend aux tripes. L'écriture de Cormac McCarthy est tout à fait singulière, tout est décrit avec minutie et comme si tout avait la même importance, les paysages comme les gestes quotidiens, les rixes comme les actes dans leur technicité la plus pointue, les envolées, les argumentations théoriques comme les dialogues les plus banals… McCarthy ne sonde pas les âmes, ne s'embarrasse pas de psychologie, c'est son style, ses descriptions qui dessinent ses personnages. Les reliefs de leurs personnalités comptent peu, car ce qui accroche, c'est une histoire, une trajectoire, une destinée qui se fondent dans une quête infinie, une recherche mystique, et la révélation d'une angoisse diffuse qui atteint le lecteur de plein fouet.
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