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Critique de KrisPy


Howard McCord, « L'homme qui marchait sur la Lune », débute à nouveau le récit de ses longues marches en solitaire en Islande et dans les déserts du Nouveau-Mexique, par une ode à la lumière : « Il y a de l'absurdité ici et là-bas dans l'obscurité, mais elle relève de nos systèmes de concepts et nullement de l'existence ou de l'âme. S.S. Engel. (…) La lumière est l'élément dominant. Minuit est d'or. Crémeux. Midi est d'argent. J'avais oublié comment étaient les étoiles, et la lune m'a pris par surprise quand je l'ai revue deux mois plus tard. » Car la lumière est ce qui nous touche le plus secrètement et profondément quand nous regardons un paysage, quelque chose d'insaisissable et de très subtil, relevant presque de la magie.
Il y est sensible à la magie, ce professeur de littérature, médiéviste, qui ne reste jamais très longtemps le derrière sur une chaise.
Hormis la compagnie de sa femme et celle de deux vieux copains d'armée (car le bonhomme a été pendant quelques années dans la marine américaine, ce qui lui a donné le goût des voyages et de l'Asie, dont il est spécialiste également), il n'aime que la compagnie des grands espaces. C'est un compulsif de la marche, un peu comme le personnage d'Harry Dean Stanton dans Paris-Texas, mais sans le côté « hobo ».
Quand il délaisse son désert chéri, il se promène donc parfois autour du globe, profitant des bourses d'études qui lui sont accordées. Il écrit de la poésie ou des récits de voyages. Mais comme il le dit mieux lui-même, dès qu'on cherche à poser des mots sur certaines choses, elles disparaissent aussitôt, à l'instar d'un somptueux paysage qui devient bêtement banal dès qu'il est photographié.
Et pourtant, j'aime la prose sans fioriture d'Howard McCord. Elle me donne des ailes aux pieds.
Par sa manière brute et poétique, il s'apparente à ma façon de marcher et de percevoir la nature. J'ai marché pendant cette lecture, et ces écrits plein de sagesse ont résonné au plus profond de moi.
Comme lui je suis une adepte de la nature en solitaire, et comme lui, j'ai pu noter l'apparition de petits miracles, comme la découverte, il y a deux jours, de ce petit coin de forêt, nourri par une source souterraine, qui m'a offert ce parterre de fraises des bois mûres à point, alors que partout ailleurs, elles ont disparues. C'est, comme pour McCord, ce pourquoi entre autres je chéris la Nature, et elle me le rend bien.
Et comme McCord (Dieu que j'aime cet homme…), j'ai un besoin vital d'être au plus proche de la nature et au plus loin des hommes. Car nous y retrouvons ce qui semble faire défaut aux humains de nos jours : pureté, beauté, honnêteté, grandeur, générosité.
Et les hommes de peu de foi, de peu d'âme, les hommes de rien, toujours plus avides de prendre, et toujours moins prêts à donner en retour, ceux-là manquent de courage et d'honneur pour oser marcher vers l'extrême, voire pour marcher tout court !
Howard McCord lui reste fidèle à sa vision d'une nature en éternelle renaissance, d'une infini générosité, même dans les endroits inhospitaliers. Car pour qui sait regarder, et surtout voir, la beauté est partout, les surprises innombrables.
Mais il ne s'agit pas d'arriver en dilettante, et de se promener en espadrilles sur les glaciers (quoique…), mais bien d'être en pleine conscience, averti, alerte, préparé, prêt. Prêt à faire face à la difficulté, à l'aridité, à l'imprévu, au danger. La nature n'est pas innocente.
C'est plus qu'à une marche vers l'extrême que nous convie McCord, il nous invite à nous retrouver. A être. En laissant tout le fatras politico-socio-religieux dont nous affublent nos droits et devoirs de bon citoyen. Lui-même le confesse, ce n'est pas aisé. Mais le challenge vaut bien la récompense.
Car McCord est un artisan de la pleine conscience, cette chose absconse que peu de gens connaissent en fait, et expérimentent réellement, si ce n'est les moines bouddhistes et les maitres zen.
Mais sans pour autant courir tout nu dans le désert, on peut expérimenter la pleine conscience et les plaisirs de la marche en solo, juste à mettre de bonnes chaussures, prévoir de l'eau et à grignoter, et go ! Vous pouvez aller où vous voulez, l'important n'est pas la destination, mais le chemin. Il suffit de marcher et de se concentrer sur ses pieds.
Après, si on a la chance, comme moi, (et oui…sic) d'habiter un coin sympathique, plein de nature naturelle, c'est quand même mieux, je vous l'accorde.
Mais pensez-y, la pleine conscience, ça se gagne, c'est du boulot, mais c'est à votre portée, à la portée de vos pieds… Ou alors, commencez par lire du Howard McCord, il vous poussera peut-être aussi des petites ailes aux pieds…
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