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Critique de sylviedoc


J'ai reçu ce fort beau cadeau lors d'une Masse Critique privilégiée, et j'en remercie beaucoup Babelio ainsi que les éditions Monsieur Toussaint Louverture. Quand je dis "fort beau", je parle non seulement du fait d'avoir reçu les deux premiers tomes de cette saga d'un coup (il y en aura six), mais surtout de l'esthétique des livres, très travaillée et très réussie. Un fond bleu évoquant l'eau, "personnage" principal de l'histoire, et des dessins dorés incrustés avec une foule de détails évoquant des personnages et des détails que nous retrouverons dans les pages. Et jusqu'au mot "merci", à côté du prix du volume !
On va voir beaucoup d'eau couler au fil de ce récit, qui débute justement par une crue dévastatrice. La ville de Perdido, que l'auteur situe au sud de l'Alabama, est ravagée par la montée de la rivière du même nom, et les dégâts sont immenses. Les habitants se sont réfugiés sur les hauteurs, et notamment dans l'église Zion Grace où l'on va retrouver les membres des trois familles les plus riches de la ville dont les vastes demeures ont été les premières touchées. Oscar Caskey, Premier Gentleman de la ville, est justement parti faire une reconnaissance en bateau avec son domestique noir Bray. Et surprise ! Une femme à l'opulente chevelure rousse a survécu dans une chambre à moitié immergée de l'hôtel Osceola et leur fait signe depuis sa fenêtre. Les deux hommes vont secourir l'inconnue et la ramener à l'abri chez l'oncle d'Oscar, James. La jeune femme, Elinor Dammert, prétendra être venue pour remplacer une enseignante partie pour une autre ville. Comme elle a perdu la presque totalité de ses affaires (dont ses papiers) dans la crue, impossible de vérifier ses dires. On est en 1919, les moyens de communication ne sont pas ceux d'aujourd'hui !
Qu'importe, Elinor se fera vite une place dans la ville, puis dans le coeur d'Oscar, au grand dam de sa mère, Mary-Love Caskey, grande figure de la bourgeoisie de Perdido. Mary-Love porte bien mal son prénom, elle n'aime pas grand monde en dehors de sa famille proche et cet amour est plutôt étouffant ! Sa fille Sister (bien réducteur comme prénom) demeure encore chez elle, faute de trouver un mari, et son fils Oscar également. Bien qu'il dirige la scierie familiale (avec James) et ait largement contribué à la prospérité de la famille, il est entièrement sous la coupe de sa mère. Celle-ci qui n'éprouvait déjà pas beaucoup de sympathie pour Elinor (rien que la couleur des cheveux de celle-ci la rend "suspecte") va carrément la haïr lorsque qu'Oscar lui annoncera son intention de l'épouser. Elle n'aura de cesse de contrecarrer les projets du couple.
Mais Elinor n'est pas du genre à se laisser dicter ses actes...
Le cadre est en place, les principaux protagonistes campés, l'histoire peut commencer.

J'ai d'abord pensé lire une simple saga familiale un peu du genre "Dallas" dont les anciens comme moi se souviendront sûrement : de riches familles, des conflits et des rivalités, des histoires d'amour contrariées. Il y a certes de cela dans "Blackwater", mais bien d'autres ingrédients aussi. Déjà le contexte est très différent, on est bien dans un état du sud des Etats-Unis mais en 1919, époque où la ségrégation est très marquée, les Noirs ne sont certes plus esclaves, mais parqués dans leur propre quartier et pour la plupart employés comme domestiques, ou "compagnons de jeu" pour les enfants de riches blancs. Cet aspect est fort bien expliqué par l'auteur. Perdido est une petite ville, où trois grandes familles possèdent des scieries qui font vivre toute l'économie locale. Elle est encerclée par deux rivières, la Perdido aux eaux rougeâtres, et la Blackwater. A leur confluence se forme un tourbillon très dangereux, où plus d'un a déjà perdu la vie. Ces rivières sont au centre du récit, et Elinor est fortement "reliée" à elle, d'une façon assez surnaturelle. Certains passages frôlent le fantastique, je pense que cet aspect va s'amplifier dans les prochains tomes, du moins j'aimerais bien ! Ce sont justement ces passages qui m'ont le plus séduite, le mystère est frôlé, mais pas encore vraiment dévoilé. J'ai apprécié le caractère fort, mais sans agressivité apparente, de cette femme, qui possède un sens de la justice parfois poussé à l'extrême. Elle est la seule à s'opposer à Mary-Love, et à obtenir ce qu'elle désire, parfois au prix de concessions qui m'ont paru un peu exagérées. Sister et Oscar par contre m'ont souvent énervée, leur faiblesse face à cette mère abusive m'a donné envie de leur mettre quelques coups de pied au derrière ! Les domestiques noirs jouent également un rôle dans le récit, ils font le lien entre les différentes maisons de la famille et sans eux rien ne tourne rond. J'aurais souhaité que d'autres personnages soient un peu plus développés, mais cela viendra sans doute dans la suite. L'écriture est fluide, ça se lit vite et ça coule...comme de l'eau ! J'ai d'ailleurs lu les deux volumes à la suite en deux jours.
Je ne connaissais pas l'auteur, mais une petite notice jointe à l'envoi comporte une rapide biographie. J'ai été surprise de découvrir qu'il s'agit d'un auteur contemporain, et que cette saga a été écrite de janvier à juin 1983, mais que la présente édition en est la première traduction française. A la lecture, j'aurais plutôt pensé qu'elle datait des années soixante, le style étant légèrement désuet. J'ai également découvert qu'il avait écrit des scénarii pour Tim Burton, le célèbre Beetlejuice.
Les prochains tomes vont paraître à raison d'un tous les quinze jours entre avril et juin, j'espère avoir la chance de poursuivre cette aventure.
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