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Critique de Yaena


Yaena
05 novembre 2023
Chez les Girard la paranoïa se transmet de génération en génération. C'est presque génétique. Leur mode de vie d'ailleurs s'en ressent. Isolés sur les terres de Panther Gap ils vivent presque en autarcie. N'espérez pas être invité chez eux pour un brunch, ce n'est pas le style de la maison. Pour autant ils sont plutôt sympathiques, l'auteur évite le cliché des fous furieux complotistes survivalistes.
Alors qu'est ce qui les pousse à se comporter ainsi ? Des convictions profondes certes, mais pas seulement. C'est la faute de pépé. Il a fricoté en d'autres temps avec des types pas très recommandables. Pas du genre non plus à oublier une vieille rancoeur, qui, il semblerait, s'est aussi transmise de génération en génération. Mais comme un homme averti en veut deux les Girard depuis sont sur leurs gardes. Léo le fiston est depuis toujours sur le qui vive, un passé flou, il semble en connaître un rayon sur la survie, les armes et la stratégie militaire. Bowman le petit fils est surprenant, à côté de lui Mike Horn peut aller se rhabiller. Animé d'un instinct sur développé il est plus à l'aise en pleine forêt équatoriale qu'en plein centre ville. Ses chances de survies semblent d'ailleurs plus élevées dans la première situation que dans la seconde.Summer la petite fille n'est pas en reste. Plus « civilisée », elle a un caractère franc et direct et ne recule devant rien. Téméraire elle sait aussi écouter son instinct. Son lien avec son frère est très fort. Il y a aussi tonton Jeremy, ancien navy seal, et tonton Darwin, cuistot de son état. Ne le sous estimez pas, manger est la base de la survie tout le monde sait ça, et puis qui manie mieux les couteaux qu'un cuistot ?

Évidemment il y a le grain de sable : Sam, avocat fiscaliste et accessoirement randonneur paumé suite à un petit imprévu. Il va se retrouver sur les terres de Panther Gap et mettre un bazar improbable. Heureusement pour lui Summer a un bon pressentiment et le chien, Marco, l'a à la bonne. Mine de rien c'est un allié de taille.

Les animaux chez les Girard sont des individus à part entière, pas des êtres considérés comme inférieurs, j'ai beaucoup aimé cet aspect. J'ai adoré rencontrer Alecto, un aigle qui en impose et qui aurait certainement beaucoup à apprendre aux humains. C'est elle (oui c'est une dame) que l'on rencontre en premier. Et quelle entrée en matière !

J'ai été happée par les premières lignes. le lien avec la nature, les animaux, les descriptions des lieux, l'attachement de cette famille au vivant, qu'il soit animal, minéral ou végétal m'a embarquée et séduite. Cette famille qui se place sur le même plan que ce qui l'entoure et non en maître, en dominant, a eu tout de suite mon adhésion. Un parfum de chamanisme s'est mis à flotter sur les pages, mêlé à des réflexions écologiques, puis à des questionnements sur l'Homme et ce qui pourrait être appelé, selon le point de vue où on se place, sa déchéance plutôt que son évolution.

L'histoire alterne entre les années 80/90 et les années 2000. Peu à peu les éléments sur ce qui a précédé ces périodes se révèlent mais pas totalement. L'auteur dénonce la main mise post colonialiste des grandes industries des pays riches sur les terres des autochtones, avec des manières de malfrat de la pire espèce. Une histoire intelligente, engagée, qui vous tient en haleine, j'adore.

Puis l'intrigue a pris le pas sur tout le reste et toutes ces réflexions sont passées au second plan, n'ayant plus pour seul objectif que de servir l'histoire. Dommage, d'autant que si, initialement, tout ceci était plutôt bien mené et les évènements bien articulés, par la suite j'ai été frustrée par plusieurs choses. Tout d'abord le manque de liant de l'intrigue arrivé à mi parcours, beaucoup d'ellipses, de questions qui restent en suspend, et par dessus tout, une fin qui laisse un goût d'inachevé. Trop expéditif. Je reste avec plus de questions que de réponses. Comme une promesse non tenu. Côté personnage il y a de trop grandes différence. Ceux de Léo et Bowman sont très fort et éclipsent un peu les autres. J'ai attendu pendant tout le livre que le personnage de Summer se révèle, en vain. J'ai attendu de savoir ce que Bowman allait faire de sa différence, en vain.

Il y a une grande originalité dans ce récit mais j'ai l'impression qu'elle n'a pas été exploitée jusqu'au bout. Je n'arrive pas à me détacher de cette impression de gâchis.

Cependant, une fois le livre refermé il me reste des questions induites par ma lecture. Comme des provocations de l'auteur.
Sommes nous devenus si étrangers à notre nature que nous en avons perdu notre instinct de survie au point de nier le suicide écologique engendré par notre mode de vie ? L'argent a t'il à ce point annihilé tout bon sens chez l'Homme ? Savons nous encore vivre avec la nature qui nous entoure ou ne savons nous que tenter de la soumettre ?
Au moins là je ne peux pas lui en vouloir de ne pas avoir apporter de réponses. D'ailleurs à ce sujet, vous avez le choix entre les 3 questions et 3 heures pour répondre après je ramasse les copies!
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