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Critique de gatsbi


gatsbi
30 septembre 2023
Dans la famille Vorkosigan, je demande le père...

Je vois déjà les chipoteurs : dans le deuxième épisode de cette saga (le troisième si l'on compte le prequel), c'est toujours la mère – alias Cordelia – qui a le rôle principal et dont on suit le point de vue. M'enfin bon, je ne connais pas la suite et je me dis que c'est peut-être bien le meilleur timing pour s'intéresser au père, car après le fils risque de voler la vedette !

En réalité, Aral Vorkosigan est tout aussi central et aurait fort bien pu donner son nom au roman. D'une part, Cordelia est désormais épouse de seigneur et en accepte toutes les implications. Elle se voit et est vue avant tout comme la « femme de », ce qui contribue à garder son époux sous les projecteurs. D'autre part, et contrairement à ce qui se passait précédemment, l'action est entièrement circoncise dans la planète natale des Vorkosigan, Barrayar. C'est donc bien l'univers d'Aral que l'on découvre (par les yeux de Cordelia). Avec sa société, ses us et coutumes. Et même si Cordelia, fidèle à elle-même, ne pourra s'empêcher de prendre l'initiative dans la dernière partie, c'est bien Aral qui est à la manoeuvre.


Mes impressions : un bon roman, certes, mais je suis sceptique quant au prix Hugo qu'il a raflé en 1991. D'ailleurs, je l'ai trouvé inférieur au précédent…

Je commence à bien cerner le genre, le style de cette saga, même s'il faudra sans doute lire quelques épisodes dédiés au héros Miles Vorkosigan pour se faire une idée plus complète.
L'autrice a un style bien à elle, je dirais même qu'elle a su créer une sorte de sous-genre. Une saga de Space Opera, oui, mais à la façon des comédies américaines, de leurs héroïnes, de leurs romances et de leur légèreté. Et le mélange fonctionne à merveille, c'est une réussite de ce côté-là, et c'est l'essentiel. Personnellement je ne m'y retrouve pas beaucoup, d'où ma note en demi-teinte, mais il est certain qu'il y a un public pour ce genre de romance.


Commençons par l'aspect space opera, justement. Dans l'épisode précédent, il était évident : un récit éclaté sur plusieurs planètes, des races en conflit et des guerres spatiales… Ici, rien du tout ! Un monde, une planète, une société, très peu de contexte.
Plus généralement, dans ce roman, l'aspect SF est réduit à peau de chagrin, c'est assez frappant. Je me suis souvent fait la réflexion que l'autrice aurait pu raconter peu ou prou la même histoire en transposant dans un tout autre univers, y compris sur notre bonne vieille Terre, et sans aucune référence à la SF.
Barrayar, c'est l'histoire ultra classique d'un seigneur (et son épouse) qui se voit propulsé au sommet du pouvoir, qui subit un putsch, et qui manoeuvre pour revenir au pouvoir. Intrigues de cour, intrigues de cour, intrigues de cour !

J'ai tout de même appris deux ou trois choses sur l'univers. Par exemple, il semble que les Barrayarans et les Betans (comme Cordelia) soient des races humaines fort peu différentes finalement. Je n'en étais pas encore sûr à la lecture du précédent roman. J'ai un peu l'impression que finalement, l'univers de la série (et les sociétés décrites) n'est pas aussi original ni exotique que je l'imaginais au début. Comme si pour l'autrice, l'essentiel était la romance et les péripéties, le décor et le décorum n'étant qu'accessoire.

Aussi, les sociétés bétane et barrayarane, qui semblent ne pas pouvoir se comprendre tant elles s'opposent, nous sont étonnamment familières. L'autrice semble avoir simplement pioché dans notre propre société, contemporaine et passée, et opéré un clivage essentiellement selon l'axe progressiste – conservateur. C'est sur le thème de cette opposition que repose toute l'intrigue, d'ailleurs.

Rien de bien original, donc. du très grand classique, et les intrigues ne sont guère plus impressionnantes.


Côté personnages, la première partie est la plus ardue, avec la plongée dans la société des « vors » (la noblesse barrayarane). Beaucoup de noms, mais on finit par s'y faire. Rapidement on reconnaît les personnages principaux comme Piotr, Koudelka, Bothari, ou Droushnakovi.
Par rapport au premier roman, l'aspect romance monte en niveau. La relation entre Cordelia et Aral occupe toujours une certaine place, mais s'est surtout celle entre Koudelka et Droushnakovi qui est développée. Et là on nage vraiment dans le plus caricatural de la comédie romantique américaine, avec ses malentendus, ses amoureux maladroits qui ne se comprennent pas, ses entremetteuses… Les scènes, les dialogues, tout est ultra cliché, l'autrice maitrise son sujet, c'est sûr !

Sinon, il y a toujours cette touche féminine assez nette, avec l'accent mis sur les thèmes du mariage, de la grossesse et de l'accouchement (il n'est presque question que de cela !). Une vision féminine de la comédie typée space opera, certes, mais peut-être pas une vision si féministe que cela. Certes, l'autrice reprend tous les ingrédients militaristes propres au genre en les passant au crible des grands thèmes du cycle de la vie. Certes, elle donne le rôle principal à une femme, dans un univers d'hommes. Mais le personnage de Cordelia n'a finalement rien d'émancipateur : chaque fois qu'elle se distingue dans le verbe ou l'action, c'est en tant qu'épouse (comme son altercation avec l'armurier).


Cette réflexion sur la dimension féministe ou pas (je considère que non dans ce cas, et ce n'est nullement une critique) m'a rappelé L'effondrement de l'Empire. La trilogie de Space opera de John Scalzi a de nombreux points communs : un vaste univers galactique fait de sociétés humaines, une lutte pour le pouvoir entre maisons nobles avec un empereur au sommet, des intrigues de cour, des putsch, des otages, des révolutions, des morts par milliers, beaucoup de romance également… Par contre l'esthétique est tout autre, et à mon sens L'effondrement de l'Empire fait beaucoup mieux dans presque tous les secteurs : l'univers SF est vraiment concret, l'organisation de la société plus originale, les scènes d'actions sont plus développées, les intrigues sont bien plus complexes et les personnages sont plus crédibles. Enfin il y a un parti pris féministe étonnant qui vaut le coup d'oeil.

Une comparaison plus honnête et plus intéressante serait de confronter l'oeuvre de Lois McMaster Bujold avec celle d'Orson Scott Card : La stratégie Ender. Deux visions très différentes !
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