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Critique de Chrisdu26


"Le masochiste est celui qui vit l'attente à l'état pur"
Gilles Deleuze

Quand j'ai vu ce roman, bien en vue, sur une étagère de la FNAC, je me suis dit que c'était un signe pour me l'offrir. J'ai vite compris que le roman allait au delà des images fleur-bleue de Mickey Rourke et Kim Basinger. Plus dans le sadisme. Plus dans le masochisme. Plus dans l'acte, la domination, le laisser-aller et le lâcher-prise.

Il ne s'agit pas d'une romance mais bien d'un fragment de vie de l'auteure aussi irréel qu'un rêve. 9 semaines ½ de relation intense, passionnelle et cruelle. Une parenthèse isolée, mais suffisante pour la mener au bout de ses limites, au bout de l'inconcevable...

Ingeborg Day alias Elisabeth McNeill change de nom pour l'écriture de ce livre, afin de protéger sa fille alors adolescente. Elle met sur papier une liaison sado/maso, une rencontre qui la marquera dans sa chair à jamais.
Alors qu'elle se soumet par amour et fascination, lui est dans le sadisme pur et dur. Elle ne représente qu'un objet sexuel, de brimade et de torture. Il ne lui fait pas l'amour, il la baise ne prenant du plaisir que dans la domination, la souffrance et le contrôle. Les scènes de cruauté vont crescendo et entraîne sa victime à dépasser les frontières de l'inacceptable. Elle est sous son emprise et devient accro à cet homme, à sa perversité et à la jouissance de son propre corps comme un drogué peut l'être à l'héroïne.

« Mon cerveau est complètement bloqué par les spasmes convulsifs qui agitent mes muscles. Il masse mes seins ; j'ai du mal à respirer par le nez, car les larmes l'emplissent. […] La terreur soudain m'envahit : Je suis persuadée que je vais étouffer. Oui je vais étouffer, je vais mourir… Il écarte mes jambes ; cela me tend encore plus. Je hurle. Un son faible s'échappe de mes lèvres bouchées, semblable à une corne de brume dans le lointain. Pour la première fois de la soirée, il paraît intéressé, et même fasciné. Ses yeux sont tout près des miens ; quelque chose passe et repasse très légèrement sur mon clitoris. Ses doigts sont pleins d'huile ; je continue à crier, mais mes cris de douleur se transforment et peu à peu se confondent avec ceux - assez semblables - que je pousse quand je jouis. Et finalement je jouis. »

Cette histoire m'a fasciné par la justesse du ton de l'auteure. A travers ces pages, elle délivre, sans gêne et sans tabou, son histoire, comme pour exorciser cette liaison. Jusqu'où pouvons-nous aller par amour ? Que peut-on accepter ? Quelles sont nos limites ? Ingeborg Day va se révéler à elle-même en se noyant dans la souffrance, l'humiliation et la dévotion qu'elle porte à son amant. Ce n'est pas elle qui met fin à cette idylle mais bien son corps qui abdique, ne la porte plus et tire la sonnette d'alarme.

« Oui les nuits étaient réelles, et dures, tranchantes comme des rasoirs, lumineuses et clairement dessinées. Paysages différents, contrées différentes ; chaleur, crainte, froid, plaisir, faim, souffrance, désir, volupté, débordante, envahissante. »

Si apparemment les nuances de gris ne remportent pas tous les suffrages critiques, il a eu le mérite au moins de faire rééditer ce roman un peu oublié des années 80, tant le film à pris le dessus sur son double littéraire.

« La douleur était toujours un prélude au plaisir, conduisait toujours, par un chemin plus au moins long à l'orgasme ; elle devenait pour moi aussi sensuelle, aussi désirable, aussi essentielle à l'acte d'amour que les caresses. »

9 semaines ½ ou comment rendre 50 nuances de Grey bien fade !


Lien : http://marque-pages-buvard-p..
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