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Critique de Tandarica


C'est d'abord une histoire qui mérite d'être racontée: Selma Merbaum (son nom à l'état civil) est morte en 1942, à 18 ans, dans un camp de travail ukrainien. Elle était juive, roumaine et germanophone, connaissait aussi le français et le yiddish, vivait à Czernowitz, à l'époque en Roumanie. Il est censé exister une traduction en français de son "anthologie" (Blütenlese), introuvable.
Comment ces poèmes nous sont-ils parvenus? Lorsqu'elle a été déportée, elle a dû emporter son petit cahier artisanalement relié, ce qui n'a sans doute pas été sans difficultés. Il était destiné à l'origine à Leiser Fischmann, dont elle était amoureuse, apparemment sans réciprocité. Elle a donné le cahier à quelqu'un, au camp, qui l'a transmis à son amie Else, qui l'a donné à Leiser. Lui, cependant, souhaitait émigrer en Palestine, ce qui n'était pas sans risques. Il a redonné le cahier à Else, son bateau a coulé et il est mort en mer. Après de multiples péripéties, le cahier est arrivé en Israël, où son ancien professeur, Hersh Segal, l'a vu et l'a fait imprimer. Après quoi, il a été remarqué en Allemagne et est devenu un livre culte.
L'édition Reclam ne reproduit pas l'épigraphe de Ionel Teodoreanu, une influence roumaine entre autres: Selma a également traduit Discipol Mihnea (comme Paul Verlaine ou Itzik Manger) et était la cousine de Paul Celan. D'origine populaire, Selma fait penser au départ à ceux qu'on a appelés les "Liverpool poets": poésie fraîche, simple, pas intellectuelle. Pour autant, cette impression ne résiste pas trop à l'examen: même si elle ne se lance pas dans des expérimentations comme Paul Celan et son travail sur la polysémie ou les métaphores, Selma s'autorise quelque rimes imparfaites et travaille sur le sens en utilisant en particulier des vers très longs. Elle inclut également dans son anthologie des traductions de poèmes. Sur les thèmes et le fond, il est assez miraculeux de voir l'évolution de la poétesse de ses débuts bucoliques aux derniers poèmes, écrits à l'époque du ghetto de Czernowitz, conscients de l'approche de la mort, à laquelle on a l'impression de la faire échapper miraculeusement à la lecture. Si seulement…
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