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Critique de SMadJ


"Sale temps pour le pays" de Michaël Mention - La chronique météo !

Sale temps pour le pays certes, mais soleil au beau fixe pour le lecteur. C'est le coeur empli de soleil qu'on referme ce livre. Pas qu'il donne la pêche, il est sombre et dépressif à souhait, mais on le referme avec la conviction d'avoir rencontré un grand auteur. Ce n'est pas si fréquent.

C'est donc un roman gris, brumeux mais nerveux que nous offre Michaël Mention. Un livre-ronces, une fois vos mains posées dessus, vous ne pourrez plus vous en extirper, au grand risque de vous en déchirer le coeur. Vous voilà prévenu.

La perfide Albion vue par un auteur français, en voilà une brillante idée. Et Michaël connaît son sujet sur le bout des doigts.

Mélangeant les aspects sociaux , culturels et politiques des années 75 à 81, c'est tout un pan de vie qui nous est contée ici. L'ère du changement. La période qui a vu l'humanité occidentale sombrer vers nos temps modernes, plus secs, individualistes et impersonnels. Une période-clé et riche. Après les swinging sixties, l'Angleterre se prend en pleine poire les déprimantes seventies. Shocking ! God save the Queen, son !

L'auteur nous narre, ou nous remémore selon notre âge, les événements qui ont encadrés ces 6 années. On y suit l'avènement de Thatcher et les premiers relents de la crise et du libéralisme qui viendront dévorer des millions de vies. C'est à ce moment que la finance l'a définitivement emporté sur l'humanisme. R.I.P.

Une fois le social mis de côté, c'est surtout une formidable enquête déroulée par un auteur de génie qui vous attend ici. Mention s'inspire ouvertement du tueur en série anglais nommé "L'Eventreur du Yorkshire" et nous propose une virée en enfer aux côtés des enquêteurs. 6 années d'enquête abruptes, douloureuses et usantes qui ne laissera aucun d'entre eux indemne.

La grande force de Mention, ce sont ses personnages. Ses flics sont terriblement humains, incroyablement réalistes. On pourrait les toucher du doigt tellement ses mots accouchent de chair, laissant votre imaginaire s'encastrer dans la réalité.
Ce livre vous hantera plusieurs jours durant. Ses personnages hurleront jusqu'à ce vous ouvriez de nouveau le livre pour les retrouver. Que ce soit l'irascible Georges Knox, ce dandy de Mark Burstyn, cet incompétent de Caine ou ce puriste de Walter Bellamy. Il sera dur de s'en défaire. Après tout, vous aurez passé 6 années ensemble...

L'auteur bricole ses pages et ses chapitres avec brio, jouant avec nos nerfs, titillant nos sens. Sa construction est parfaite, huilée avec précision. Il nous fait des collages déments de ses chapitres recouvrant son intrigue de fines couches pour l'épaissir et la muscler.

Michael a la phrase acerbe, le verbe-enclume, le mot qui pèse.
Sa façon de nous décrire les confrontations entre les flics ou avec les suspects est phénoménale. Ca tape fort, ça fait mal, ça heurte. Mention nous a écrit un western britannique, nonchalant puis allumé. Doux puis corrosif. Calme puis explosif.

C'est musical, c'est Rock, c'est Punk, c'est énervé, enlevé. Le ton colle à la peau de l'époque décrite, les seventies finissantes.

Sale temps pour le pays est aussi un formidable moment d'humanité, bouleversant quand il s'agit de la maladie, bouillonnant quand il s'agit de l'enquête, déprimant quand il raconte son piétinement, attachant quand il sublime l'amitié.

Il faut être un saint-homme pour nommer un de ses chapitres "Anarchy in the UK" et y évoquer la reine #sexpistols4ever. N'attendez pas qu'il ne soit canonisé pour le lire. En général, c'est trop tard. 4/5

PS : merci à Gruz pour m'avoir si souvent mis l'eau à la bouche et donné l'envie de lire cet incroyable écrivain qu'est Michael Mention.
Lien : http://cestcontagieux.com/20..
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