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Critique de LaBiblidOnee


Emouvant dans sa retenue, ce récit dédié à Ceux qui restent. Son titre vous évoque peut-être les familles de militaires attendant leur retour dans le manque et l'angoisse, ou encore les militaires renouvelant leurs contrats tandis que d'autres retournent à la vie civile ; Mais dans notre histoire, Ceux qui restent sont aussi et surtout ceux qui demeurent en vie quand leurs frères d'armes sont morts en mission : Ceux qui vivent avec la culpabilité du survivant, les images de l'enfer, les cauchemars. Certains espèrent s'arrêter à temps, d'autres se font soigner, certains désertent, d'autres préfèrent en finir... Certains encore font juste semblant d'aller bien, parce qu'on doit se montrer solide et tenir pour les autres. Jusqu'à ce que l'horreur les rattrape.


Un matin comme un autre, Lulu, un caporal-chef d'expérience sur qui tout le monde s'appuie, disparaît de la maison familiale où il passait sa permission. Sa femme s'inquiète et ses collègues encore plus, qui savent d'une part que Lulu n'est pas homme à déserter, mais d'autre part… qu'ils revenaient tous d'une opération qui s'est mal finie, par la mort de l'un d'entre eux. La cellule psychologique mise en place a estimé que Lulu avait des mécanismes de protection faisant encore assez illusion pour être autorisé à achever la mission sur place, mais qu'il devait être suivi par la suite. Sauf qu'entre temps Lulu a disparu. Et tout le monde espère qu'il n'a pas fait de connerie. Accident ? Alcool ? Bagarre qui a mal tourné ? Désertion ? Problème de couple ? de famille ? Escapade ? Est-il mort ou vivant ? Et où le trouver ?


Parce que ça ne ressemble pas à Lulu, et qu'il a beaucoup donné à tous, 4 de ses frères d'armes sont autorisés à prendre quelques jours pour le chercher et le ramener. Commence alors la recherche d'indice auprès de la famille, dans la lecture de ses carnets personnels dont personne n'avait connaissance… Jean Michelin construit son récit autour de l'alternance judicieuse des chapitres de la recherche avec celle de la vie en opération et particulièrement de la mission ayant mal tourné. En nous décrivant tour à tour ce que les militaires ici ont dans la tête, puis ce qui s'est passé là-bas, il finit par lever le voile sur la disparition de Lulu.


L'auteur ayant été militaire, il nous offre un roman qui fleure bon le réalisme, l'expérience et le vécu, parvenant à nous faire toucher du doigt la situation. Son écriture sans fioriture nous met rapidement dans l'ambiance. Cependant, j'ai ressenti une certaine distance avec les personnages qui a manqué de me décourager vers le milieu. Je pense que mon ressenti est dû pour un tiers à l'écriture factuelle d'une apparente froideur ; pour un tiers au fait que l'auteur nous fait tour à tour approcher chacun de ses personnages principaux, ce qui maintient le suspense mais, au début du moins, nous empêche d'en approfondir un en particulier, de qui on se sentirait vraiment proche ; et pour un tiers au fait que les personnages, portraits réalistes sans aucun doute, demeurent toujours un peu dans la réserve lorsqu'il s'agit de se livrer. On perçoit la différence entre le masque qu'ils montrent aux autres et ce qu'ils ressentent, mais jamais dans la démesure puisqu'ils tentent toujours de rester dans le contrôle.


Au début, les non-dits créent une tension bienvenue et prometteuse, mais lorsqu'on piétine avec eux sur l'enquête, on aimerait soit qu'ils se livrent plus, soit que l'enquête avance : Cette apparente froideur, que ces hommes sont habitués à conserver pour masquer et maîtriser la tempête intérieure, a failli me lasser malgré la complicité virile qui les lie. Heureusement arrive à point nommé une révélation qui va tout changer. Elle ravive l'intérêt, fait redémarrer l'enquête, mais surtout elle amène l'émotion. Et ça, ça fait du bien. Je ne l'avais pas vue venir malgré les indices laissés par l'auteur. J'ai trouvé ça vraiment très beau même si je voudrais bien discuter d'un détail en MP avec ceux qui l'ont lu (je crains un peu le revirement pour le revirement... sauf si un truc m'échappe, je laisse le bénéfice du doute). Bref, j'ai finalement passé un bon moment de lecture, sensibilisant au sens du devoir et du sacrifice de ces hommes (puisque les femmes dans cette histoire ont le second rôle), à l'importance des codes dans l'armée et leurs dérives, la vie difficile que mènent ces corps de métier et leurs familles. J'avais Jonquille du même auteur dans mon pense-bête, ça me rappelle de l'en sortir !
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