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Critique de Annezzo


Ooooh amis anti-capitalistes, anti-américains, anti-dollar-société-consumériste, Henri Miller est l'homme qu'il vous faut !
Voila pas qu'avec son "Cauchemar climatisé" (pas mal le titre), il dézingue son pays natal qu'il ne conçoit plus comme "son" pays,
et il n'y va pas de main morte.
Il est tout mâchouillé d'avoir dû quitter la France en 1941 le pauvre, la guerre et ses horreurs, il s'en tape, lui est juste contrarié parce qu'à cause de ça, il a dû prendre le chemin du retour vers la patrie honnie. le pendant de sa détestation, c'est qu'il clame tout son bonheur d'avoir savouré Paris et la France à la folie, ce qui risque de décontenancer le râleur français qui n'arrive jamais à aimer son pays...
Et il passe les 70-100 premières pages à vomir sur l'Amérique, ce pays minable, nul, à chier, ridicule, écrasant. Vous en aurez pour votre pognon. Moi ça m'a gonflée, même si mes récentes lectures m'ont bien intéressée sur le rêve américain et cette persistance de déception qui s'en suit. Je continue à l'aimer, ce pays, ce pays bizarre, presque une expérience en laboratoire. Ce que j'aime, à part ses villes (en tous cas, à part New York qu'il déteste, et la Nouvelle Orléans à qui il accorde un semblant de grâce), c'est la richesse de sa créativité. Cinoche, littérature, musiques, théâtre, et mon chouchou Walt Whitman en poésie...
Il râle, donc, Riton-le-grognon. Vraiment, il faut se trimbaler ça pendant tout le livre ?
Non, finalement, notre Miller un rien brouillon a dû tomber sur une seringue, une ligne blanche ou un gros cône occasionnel, il part soudain dans un délire, nous le lecteur, on le suit ou bien on passe à un peu plus loin. Où justement voilà une dissertation sur le bien, ou la mort, ou le pourquoi, ou le comment... Encore quelques pages sautées, et il revient sur terre et daigne enfin s'enthousiasmer...
Car quand il a fini de s'exciter sur son pays merdique, Henry, voilà pas qu'il nous présente des peintres. Trois peintres, qu'il rencontre. Abraham Rattner, avec qui il voyage, avec qui il est rentré de Paris. John Marin, rapidement évoqué. Et Marion Sims Souchon, drôle de nom pour ce chirurgien de la New Orleans, qui à 64 ans s'est mis à peindre passionnément, et qui s'avère être un homme de bien, de sagesse, de gentillesse qu'on a plaisir à imaginer, dans cette Louisiane que Miller apprécie.
Très étonnée de l'entendre enfin dire du bien, j'ai été voir ce qu'avaient fait ces trois peintres-là... Et mon râleur de Henry Miller et moi, ô surprise, avons les mêmes goûts. Ses amis m'ont enchantée.
Richesse de l'univers de Rattner, qui s'est essayé à beaucoup de styles (et avait copiné avec Picasso à Paris), et balance de belles choses fortes, racées. Sur le peu d'oeuvres que j'ai trouvées de Marion Souchon, j'ai eu de vrais coups de foudre pour certaines, vibrantes des couleurs franches et pourtant mystérieuses du bayou. Et spécial coup de coeur pour John Marin et toutes ses aquarelles, celles qui parlent du New York qui se bâtit, se bâtit, et monte vers le ciel, puis un peu de Nouveau-Mexique, et enfin le calme champêtre du Maine, un régal de légèreté, riche pourtant, et même touchant de simplicité affectueuse pour ce que lui offre son pays.
J'avoue, je n'ai pas fini le livre. Encore un peu de délire camé, en quittant la Nouvelle Orléans, puis Miller enchaine avec le compositeur Varèse qu'il encense, et n'a pas réussi à me passionner. Mais je reste sous le charme des tableaux de ces trois messieurs. Ca vaut le coup d'aller les visiter sur le net, les très aimables. Pas comme Toto le grognon, mais du coup je lui pardonne tout, puisqu'il m'a fait découvrir ces univers et s'est lui-même extasié à les contempler et à nous en parler. Un prêté pour un rendu, Mister Miller !
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