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Critique de Christophe_bj


Le jeune Sébastien Roch est envoyé par son père, quincaillier à Pervenchères et avide de reconnaissance sociale, à l'école des jésuites à Vannes, surtout fréquentée par des nobles. Il va y être en butte aux mauvais traitements de ses camarades en raison de son origine sociale, et va y apprendre à connaître la noirceur de l'âme humaine. ● La caricature du petit bourgeois commerçant est savoureuse et plus puissante encore que celle des nobles. Voyez par exemple ce portait de Joseph-Hippolyte-Elphège le quincaillier : « M. Roch était gros et rond, soufflé de graisse rose, avec un crâne tout petit que le front coupait carrément en façade plate et luisante. Le nez, d'une verticalité géométrique, continuait, sans inflexions ni ressauts, entre des joues, sans ombres ni plans, la ligne rigide du front. Un collier de barbe reliait de sa frange cotonneuse les deux oreilles, vastes, profondes, inverties et molles comme des fleurs d'arum. Les yeux, enchâssés dans les capsules charnues et trop saillantes des paupières, accusaient des pensées régulières, l'obéissance aux lois, le respect des autorités établies, et je ne sais quelle stupidité animale, tranquille, souveraine, qui s'élevait parfois jusqu'à la noblesse. Ce calme bovin, cette majesté lourde de ruminant en imposaient beaucoup aux gens qui croyaient y reconnaître tous les caractères de la race, de la dignité et de la force. Mais ce qui lui conciliait, mieux encore que ces avantages physiques, l'universelle estime, c'est que, opiniâtre liseur de journaux et de livres juridiques, il expliquait des choses, répétait, en les dénaturant, des phrases pompeuses, que ni lui, ni personne ne comprenait, et qui laissaient néanmoins, dans l'esprit des auditeurs, une impression de gêne admirative. » La dénonciation des collèges jésuites, et, plus largement, de la religion catholique et de ses hypocrisies est implacable. ● Le style est certes éblouissant, avec d'innombrables fulgurances, des images inouïes, des mots rares, mais il est à mon goût beaucoup trop travaillé, relevant de l'esthétique « fin de siècle » (le roman est publié en 1890) et rappelant Huysmans ou les frères Goncourt. Ce style magnifique, mais exhibant trop de traces du labeur qu'il a fallu déployer pour le faire exister, englue l'histoire qui se meut au ralenti et augmente inconsidérément le nombre de pages. Il nuit aussi, à mon avis, à l'efficacité argumentative du récit.
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