AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de de


de
27 février 2018
L'argent n'efface pas la violence

Une publicité pour une série sur Canal+, Maison close avec le slogan « Les hommes rêvent d'y entrer, elles se battent pour en sortir ». Non seulement une fausse symétrie mais un abus de langage.

« C'est sans doute une histoire d'autrefois, dans la France d'avant 1946, date de la fermeture des bordels légaux. Cette nostalgie m'agace, car elle sert de prétexte à des images dont la complaisance masque le sordide, mais autre chose m'intrigue. Je m'arrête, relis le slogan… et vois rouge. À cause du premier mot : « Les hommes rêvent d'y entrer… » »

A juste titre, Florence Montreynaud interroge : « « Les » hommes ? Tous les hommes ? Toujours et partout ? ». Pourquoi « les » et non « des » ? Volonté d'impliquer tous les hommes, de décrire comme quasiment naturel ce rêve ou cette espérance masculiniste, de provoquer une solidarité masculine.

« En regardant cette affiche, je sens monter en moi l'écoeurement, l'indignation, la révolte. Malgré le slogan en deux parties faussement symétriques, malgré la mention de femmes en lutte, c'est le point de vue des profiteurs du système qu'on nous impose, et non celui des femmes qui « se battent pour en sortir ». »

Des maisons closes et surtout des bouches closes face à l'esclavage sexuel.

Tous les hommes ne sont pas des prostitueurs, ils ne rêvent pas d'entrer dans ces lieux pour acter de leur pouvoir, pour choisir un viol-location ou affirmer leur mépris des femmes.

D'où l'idée d'un réseau international d'hommes engagés contre le système prostitutionnel, https://zeromacho.wordpress.com/le-manifeste_fr/

Des insultes sexistes, des femmes abordées « c'est combien ? », des soit-disants « besoins irrépressibles », la fantasque « misère sexuelle » des hommes, les immondes usines à sexe (Amsterdam, Bombay, etc.), les bases de « repos et de récréation » pour les soldats, les « femmes de réconfort », le tourisme « sexuel », et les industries du sexe, le système prostitutionnel…

Dans une première partie « le refus », Florence Montreynaud aborde, entre autres, la Convention des Nations unies pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui, la fiction du « libre-choix », les débats autour des bordels, la criminalisation des victimes, les mauvais traitements des policiers et des agents du fisc, la marchandisation des corps, la prostitution comme une affaire et une responsabilité d'hommes qui paient pour un acte sexuel, « C'est parce que TU paie que la prostitution existe », les désirs qui n'implique aucun droit, ces désirs masculins entrainant et justifiant « une « offre incarnée », les mots pour dire, « Déchirer le voile du langage qui atténue l'horreur », la différence entre « consentir » et « désirer », les actes de non-liberté, les prostitueurs « de tous les milieux sociaux, toutes les origines, tous les statuts maritaux », une réalité de la révolte des prostituées lyonnaises de 1975, les impressions de mort intérieure, la menace contre toutes les femmes, « Tant qu'une seule femme sera à vendre, toutes les femmes le seront symboliquement ».

La seconde partie du livre est consacré à « Zéromacho », ce réseau d'homme qui ne se satisfont ni, bien évidement des discours des « 343 salauds », ni du silence pesant sur les actions d'autres hommes et de la stigmatisation de femmes. L'autrice a interrogé des hommes sur leur première fois, ceux qui ont payé pour « ça ». Elle aborde la situation en Allemagne (en complément possible : Manuela Schon : La légalisation a fait de l'Allemagne le bordel de l'Europe. Et nous devrions avoir honte ! et l'appel des traumathérapeutes), à la Jonquera (en complément possible, Alain Tarrius – Olivier Bernet : Mondialisation criminelle, frontière franco-espagnole de la Junquera à Perpignan et Plateforme Catalane pour le droit à NE PAS ÊTRE prostituées), en Suède (en complément possible, Trine Rogg Korsvik et Ane Stø (dir.) : Elles ont fait reculer l'industrie du sexe !).

Il convient donc bien de réfléchir à la fois « au respect de soi et de l'autre, à la place du désir et du plaisir dans une relation », à cette tolérance sociale pour la violence sexuelle et la double morale qui légitime les comportements masculins, aux rapports sociaux de hiérarchisation des femmes et des hommes (système de genre).

« le viol ou la prostitution font de la sexualité une arme porteuse de violence, de souffrances, voire de mort. Pourtant, dans la liberté et la réciprocité, la sexualité peut se révéler une source de plaisirs magnifiques ».

Ce petit livre écrit avec beaucoup d'humour, met au centre des analyses ces hommes qui paient et prostituent (le plus grand groupe social lié à la prostitution : les prostitueurs) et ceux qui « sont contre ». Il prend en compte les paroles de survivantes, analyse les rapports prostitutionnels et préconise quelques pistes pour l'égalité et la liberté.


Lien : https://entreleslignesentrel..
Commenter  J’apprécie          30



Ont apprécié cette critique (3)voir plus




{* *}