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Critique de chocobogirl


40 ans après le coup d'état militaire de Pinochet au Chili, un beau livre de photographie paraît aux Éditions Privat et fait la part belle au Chili contemporain qui se remet doucement de ses blessures.

L'ouvrage s'ouvre sur un très beau texte d'Isabel Allende. La fille du président du Chili nous raconte son 11 Septembre 1973, les heures qui précédèrent la mort de son père, leur dernière rencontre, les jours effroyables qui suivirent et la fuite qui deviendra exil. Un court texte de 2-3 pages qui pourtant se ferme avec un incroyable optimisme. Celui d'une femme qui croit en son pays et à sa démocratie.

Les photographies qui suivent sont signées Georges Bartoli. Ce photographe reporter nous offre un magnifique road book qui part à la rencontre du Chili profond et véritable. Les images panoramiques en noir et blanc s'offrent, pour la plupart, dans une double page saisissante qui accentue l'effet dramatique. le voyage commence en Patagonie pour remonter vers le Pérou. 2 mois d'errance qui permet au photographe de sonder le pays. Les légendes éclairantes se font à la fois descriptives et historiques, contextualisant les images, les reliant à des évènements ou à des faits, aidant le lecteur à comprendre le poids du passé dans un pays qui peine à se relever. Paysages et hommes se partagent leur présence sur les photographies. C'est fort, c'est poignant, c'est humain.

La terre de Feu offre un visage désolé : dernières ethnies indiennes en voie d'extinction, bateaux échoués, ports désertés, rigueur de la pêche. le Sud « n'est plus guère que l'ombre de ce qu'il fut. » Plus haut dans les terres, on retrouve les mineurs, les grands centres commerciaux imposés par Pinochet et les petits restaurants qui vivotent grâce au tourisme, le tout sous le regards des chiens errants pris en charge par tout un chacun. On traverse des plateaux désertiques, on traverse divers canaux pour découvrir enfin les Torres del Paine.

Puis c'est le territoire Mapuche qui s'avance, l'Araucania. Ici, on circule en bus ou dans de vieux ferry fatigués qui passent au large de ports oubliés où végètent dans la misère la population. Île de Chiloé, Concepción se suivent mais ne se ressemblent pas. Les mapuches résistent à l'assimilation tandis que le coeur du Chili boue d'une certaine intensité économique et culturelle.

La région du centre et ses villes célèbres offre une modernité plus marquée. Valparaíso et ses trolleys antiques, ses bars à tango et où l'ombre d'Allende plane toujours peine se rafraichir. Alors que Santiago est le lieu de la mémoire. Hommages aux disparus de la dictature, aux suppliciés qui hantent le coeur de la ville se retrouvent dans le musée de la Mémoire, au stade national, à la villa Grimaldi.

On atteint enfin le Nord et son désert d'Atacama qui contient en son sein les cadavres des corps gênants de la dictature. Une terre aride entourée de lacs salés et de volcans qui possède une richesse minérale convoitée. le tourisme se répand avec plus ou moins de bonheur. Plus au Nord encore, la mine de Calamaca concentre une grosse partie de l'économie chilienne. Chacabuco et Humberstone, anciennes villes prospères grâce au salpêtre, sont désormais des villes fantômes.

Un deuxième texte d'Isabel Allende clôture le livre. Elle retrace la biographie de cet homme qui s'engagea très tôt dans la vie publique et en fait un héros mort pour la démocratie et rappelle l'idéologie socialiste qui était la sienne. Un très bel hommage appuyé par la postface de Gérard Mordillat qui démontre que Allende reste le symbole d'un socialisme indissociable d'une démocratie universelle et nous rappelle que le triomphe du capitalisme n'est pas forcément inéluctable.
Lien : http://grenieralivres.fr/201..
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