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Critique de Krout


Papa ! Voilà ce que j'aurais écrit. Voilà ce que j'ai crié en mon cœur silencieux et muet.

Pa❤ ❤ . Voilà ce que vous auriez pu déchiffrer, car de mon cœur déchiré, deux larmes,
sur le papier vélin.

Au delà des mots, il n'y a que les larmes.

L'ordinateur n'a pas la douceur de la plume.
Et ce Pa qui s'accroche. Et cet autre noyé. Ce Papa à moitié effacé, déjà.
Je ne pourrais le raconter.

Dieu soit loué, Papa n'a pas Alzheimer. Mais n'empêche ...
Fragile, courbatu, fourbu, plié, courbé, fatigué, claudiquant, tâtonnant, ahanant, remâchant ...
Diminué
Courageux, encore, pour un temps...
Portant son âge comme une croix
Tellement recroquevillé

C'est lui que je cœure en lisant les Psaumes balbutiés d'Erwin Mortier à sa mère frappée par la maladie d'Alzheimer. Qu'ils sonnent beaux, ces psaumes ! Qu'ils plaident tendres ! Qu'ils caressent chauds ! Qu'ils humanisent profonds ! Qu'ils tissent l'au-delà !

Ce livre est poésie. Un voile de tendresse sur des sentiments exhumés, graves et autrement muets. Las, des perles de pluies masquent cette goutte à goût salé sur ma lèvre émue au sourire dissipé. Le rythme de la phrase, le velouté des mots bercent comme une vague mon cœur chaviré. Et, une onde profonde, syncopée, abyssale émane de lui, parcourt ma peau tout soudain devenue sourd tambour, tam-tam animal. Ces mots sont autant de caresses adressées à mes yeux embués, ils me portent en des cieux inconnus que seul le poète avait vus. Hélas, ils disparaissent bleu à bleu, dissipés eux aussi, dans les brumes d'un cerveau trop usé.

Après les noms, les visages,
Ensuite les gestes,
Puis le regard, et le reste
Il n'y a rien qu'elle ne ravage

Etre de brume
Voile du regard
Egaré, hagard
Brouillard
Au fil des heures
La peur, les pleurs
Douleur
Plus de mots, des maux
La rime s'enrhume

Et moi qui ne dis rien

Mon cœur à marée lasse.

Mais c'est Erwin qu'il faut lire. Erwin Mortier cet émouvant écrivain belge que je remercie Babélio et les éditions Libretto de m'avoir fait découvrir par l'entremise de l'opération Masse critique de septembre. Erwin Mortier qui couvre si délicatement d'une dentelle de Bruges la Morte l'indicible dépouillement de l'humaine décrépitude dans ses Psaumes balbutiés.
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