En mettant toute son énergie, son talent et son érudition à raconter l'inquisition et à décortiquer les (peu saints) esprits qui la justifient et la servent, à en montrer la cruauté certes mais aussi l'ingéniosité de ce système (en ce sens qu'il est construit, codifié, décliné dans toute la société), on sent que
Sandor Marai a tout le temps à l'esprit le national-socialisme et le totalitarisme, communiste ou autre, et que ce sont les mécanismes sophistiqués de destruction de l'individu et de sa liberté de penser qu'il fustige. La bonne nouvelle c'est que
le héro du livre va se détourner de son travail d'inquisiteur, non pas parce qu'il se rend compte de la barbarie et de la cruauté de l'entreprise, mais parce qu'il comprend (en assistant aux dernières heures de l'hérétique Bruno) que la tâche n'a pas de fin : il restera toujours, quelque part, "un homme suffisamment obstiné pour maudire ceux qui le supplicient dans la chambre de torture et pour continuer à affirmer ce pour quoi on le brûle sur le bûcher". Alors notre héro abandonne, et devient libre : le paradoxe c'est que cette liberté le conduit à se cacher, à ne plus pouvoir aller et venir où il le souhaite : une sorte d'exil, comme celui qu'a connu l'auteur... Autant de thèmes qui restent très actuels, non ? Commenter  J’apprécie         60