AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de ecceom


C'est là que des Athéniens s'éteignirent

Le commissaire Charitos est réputé "lent, ringard et ch..ant".
Mais suffisamment compétent toutefois, pour qu'on lui confie l'enquête autour de meurtres mystérieux.

Voici en effet, que dans cette Grèce saignée par les exigences de la Troïka, quelqu'un assassine des fraudeurs fiscaux et dépose leur corps sur des sites antiques. Autant dire que ce meurtrier est quasiment considéré comme un justicier aux yeux d'un peuple vivant entre désespoir et ressentiment. Autant dire que ces mauvais payeurs sont partis sans léser la Grèce.

Dilemme citoyen : vaut-il mieux un assassin en liberté ou un héros en prison ?
Mais Charitos est flic avant tout et un flic, surtout s'il veut de l'avancement, ça arrête. Il va donc conduire son enquête, dans une capitale grecque paralysée par les grèves, manifestations et embouteillages.

Voici un roman noir presque parfait.
Ici, pas de surenchère de gore, de cadavres découpés en lamelles et de violence gratuite.
"Le justicier d'Athènes" se situe dans la veine désormais familière du polar ethnographique, qui fait passer au second plan l'énigme policière, pour se pencher sur l'environnement, l'histoire et les moeurs.

En se donnant Athènes pour cadre, Markaris rejoint ainsi les meilleurs : Izzo et Marseille, Montalbàn et Barcelone, Rankin et Edimbourg...
Mais contrairement à ces derniers, Markaris ne recherche pas la singularité. Inutile d'espérer trouver dans ce roman, un guide touristique avec la description des métopes du Parthénon, ou le détail des recettes de cuisine locale.
Le commissaire Charitos est marié, père de famille, a des soucis de fins de mois et il est dépassé par l'informatique.
Plus qu'un roman noir, il faudrait parler de roman gris : Charitos n'a aucune certitude et ne s'estime pas représentant du Bien. C'est un homme ordinaire avec ses doutes (nombreux) et ses espoirs (rares).

Et c'est toute la force de ce roman de Markaris que de nous faire toucher du doigt les ravages de la crise économique qui crucifie le pays, sans désigner un coupable unique ou rejeter l'entièreté de la faute sur les autres. Les Grecs sont aussi responsables pour partie de leur situation : fraude fiscale, corruption, clientélisme, déliquescence politique...
Mais ça ne retire rien à leurs souffrances actuelles.

Ce roman serait donc parfait si sa fin n'était pas aussi abrupte et peu surprenante. du coup, bien que filant l'Hellène, l'écheveau manque un peu d'embrouille à mon goût.

A lire donc surtout comme un témoignage. le style de Markaris est concis, sans mauvaise graisse, mais très soigné.
Une belle découverte pour ma part et je vous invite à suivre les traces de Charitos, si vous voulez en savoir plus sur la Grèce d'aujourd'hui.

Loin devant la masse des essais distanciés et abscons, au delà des reportages arides, le Polar reste encore le meilleur révélateur d'une société. Ce n'est pas rien.
Commenter  J’apprécie          20



Ont apprécié cette critique (2)voir plus




{* *}