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Critique de PGilly


Une personne disait avoir une autre perception des faits après voir vu un "bout à bout" assemblé par l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre. Elle avait ressenti corporellement la réalité factuelle auparavant perçue en mots seulement. Voir lui avait permis d'être "touchée" par un fait qui maintenant s'imposait à elle.
Ce témoignage énoncé à la radio intervenait dans un débat sur la scène politique belge à propos de la diffusion possible de ces images choc au parlement fédéral.
Deux points de vue différents étaient exprimés sur cette question, qui jamais n'a été élargie à la possibilité de montrer aussi des images de Gaza, ce qui aurait élargi la matière factuelle. Il est plus simple de réduire le débat afin de centrer la discussion sur un énoncé simple; un propos complexe nuit à l'audience.
Ces deux exemples mettent en jeu plusieurs notions abordées dans l'essai essentiel de Géraldine Muhlmann : importance du corps dans la réception d'une information, prédominance du discours sur le récit ; simplification; impartialité, sources plurielles ... La notoriété de l'énonciateur du transmetteur-rice des faits importe également : est-il/elle digne de confiance ?
Le journaliste que je suis a apprécié les nombreuses références à la presse anglo-saxonne, puisées dans Une histoire politique du journalisme XIXè-XXè siècle, autre ouvrage de l'auteure. Exactitude, objectivité, honnêteté, curiosité, telles sont les qualités d'une information curieuse et soucieuse de saisir le sens commun d'un fait, son "human interest ". La philosophe s'attache longuement à cerner l'impartialité, difficile à poser si l'on admet qu'un fait est toujours construit !
La tendance à privilégier la discussion au récit, amène subjectivité et dépréciation des faits, phénomène amplifié sur les réseaux sociaux où des montagnes d'avis, réactions etc... relèguent la matière factuelle à l'arrière-plan. Les faits deviennent un sujet de conversation, surtout les informations bidon (fake news), monnaie courante à l'ère nouvelle de l'intelligence artificielle et du complotisme péremptoire. La fragilisation du fait guette !
Le regard de l'essayiste brasse large, invite les penseurs à préciser la dimension sensible de la factualité, puisque nos sens captent l'information en premier. C'est d'abord au corps que la vie s'impose, disait Nietzsche.
Le sérieux de l'ouvrage force le respect, rebute parfois, relance souvent l'intérêt grâce aux expériences vécues, aux études résumées - notamment sur la personnalité autoritaire -, aux histoires croustillantes sur la récolte de faits, leur traitement et leur impact.
Géraldine Muhlmann est assez pessimiste sur l'avenir de l'information au sens large. Elle constate un rétrécissement de la curiosité et un recul de la réflexion au bénéfice de l'immédiateté. Son propos élude une conclusion espérée ; elle regrette finalement un trop de réalité et moins de réel sensible. La productrice de l'émission "Avec philosophie" sur France Culture déplore la mise en danger de notre nuit mentale celle qui désigne notre obscurité intérieure, profonde, dispensatrice d'une liberté d'inventer.
Ma question sur le fait de la semaine, l'hôpital de Gaza est-il une base du Hamas ?


Lire à ce sujet l'excellent numéro (469) de le 1 Israël-Palestine : La guerre des opinions, notamment les propos du directeur de l'information de l'Agence France Presse. (https://le1hebdo.fr/).



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