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Critique de Sachka


Bambi, jolie môme mais qu'as-tu fait ? Regarde-toi, de quoi t'as l'air là ? T'es qu'une gamine Bambi, t'as pas seize ans et t'as déjà l'Rimmel qui fout l'camp, qui coule des rigoles sombres sous tes beaux yeux tristes. T'as trop pleuré jolie môme ? Non, tu pleures jamais toi, sur le vide de ta vie, sur celle que tu rêves d'avoir, une vie de princesse comme dans les contes des Mille et Une Nuits mais la vie c'est pas un conte merveilleux Shéhérazade, ton palais c'est rien que quatre murs gris tout décrépis d'un quartier ouvrier, sans chaleur ni tendresse car la vie c'est une putain d'embrouille qui te fait pas de cadeaux si t'es pas née là où il faut. Alors tu refais l'histoire à ta façon, princesse glauque et sordide, sans te douter un instant que tes petits jeux sont dangereux.

Hé toi ! Oui toi, le jeune homme dans la fleur de l'âge, l'hédoniste qui cherche une petite à gâter, luxe, calme et volupté. Gaffe si tu croises la route à Bambi, elle est bien capable de te faire la peau après t'avoir vidé les poches, même pas sûr qu'elle te laisse ton slibard, tout juste un peu d'amour propre. Tu ne le sais pas mais Bambi c'est Hilda pour l'état civil, son délire c'est de racoler et dépouiller des vieux-beaux friqués et bien mis comme toi sur les sites de Sugar Dating. Et toi tu n'y vois que du feu, juste l'envie de croire que tu peux encore pécho une petite poupée, un petit bonbon à peine sorti de l'enfance en alignant quelques billets.

Alors Bambi rêve de Thaïlande, de paradis, d'îles lointaines, de cartes postales... Elle redevient une petite fille, Bambi a le seum, Bambi a le spleen des femmes qui sont fatiguées d'avoir trop vécu. Entre deux ou trois deals de shit du côté du "Santa Barbara" avec son gang de filles et un passage à tabac d'un pigeon qui n'a pas su résister à sa petite moue de baby doll, elle essaye juste d'oublier qu'elle n'a pas la vie qu'elle mérite, que sa mère picole et qu'elle a la main un peu trop leste quand son actuel (qui lui aussi aime un peu trop les petites) se fait la malle. "La vie est une pute faut la bouyave" alors Bambi sort le gun à papa et joue à la guerre. Elle gueule, elle beugle, elle crache son fiel, sa rage, elle griffe pour faire mal et pour se faire mal car elle est comme ça Bambi, elle préfère avoir mal, plutôt crever que de se laisser aller à pleurer.

Un récit sombre, une écriture crue et féroce. Caroline de Mulder reprend avec brio les codes et le langage spécifiques de la rue en y incluant des passages d'une grande intensité, elle laisse parler le corps, la souffrance psychique. Elle dresse le portrait au vitriol d'une jeunesse à peine sortie de l'enfance et déjà désenchantée : Bambi adolescente paumée et borderline, véritable petite bombe à retardement, façonnée à l'envi par une société de plus en plus consumériste, rejette, vomit littéralement sa vie étriquée et n'a aucune conscience de la gravité et de la barbarie de ses actes, elle reproduit les violences qu'elle subit car c'est la seule manière pour elle de se révolter contre une société dans laquelle elle se sent complètement exclue et sans aucuns repères qu'ils soient familiaux ou sociaux.

Vous l'aurez compris Bambi n'aura fait qu'un bouchée de moi. Je me suis pris un aller-retour en pleine face, un uppercut, et à l'issue de ma lecture je n'ai eu qu'une envie c'est de prendre la gamine dans mes bras et de la réconforter. Je n'en dis pas plus et je vous laisse découvrir cet excellent roman de la demoiselle de Mulder.

"T'es qu'une fleur de printemps
Qui s'fout d'L heure et du temps
T'es qu'une rose éclatée
Que l'on pose à côté
Jolie môme..."



* Merci aux petits amis : Sam, Majero, Christophe-bj, Wyoming qui m'ont amenée jusqu'à Bambi.

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